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Le premier tome d'En chemin elle rencontre… m'a d'emblée conquise. C'est pour moi un outil fantastique pour lutter contre les violences envers les femmes et pour briser le silence et le déni qui entoure ces violences : d'abord en raison de la qualité de son message, rendu percutant grâce à l'engagement d'artistes talentueux, ensuite parce que la BD touche plus particulièrement les jeunes - ceux là-même qui subissent le plus de violences - et il est essentiel pour préserver leur avenir de les sensibiliser en priorité pour construire un monde moins violent et moins inégalitaire, et enfin parce que des jeunes filles pourront se reconnaître dans cette BD, se sentir moins seules et mettre des mots sur des violences dont qu'elles pourront plus facilement dénoncer.
Aussi, quand Marie m'a proposé de participer au deuxième tome ai-je été enthousiasmée par ce projet ! C'était l'occasion rêvée de faire passer des messages essentiels qui me tenaient particulièrement à cœur : informer sur la gravité de l'impact des violences sur la santé psychique et sur l'importance de traiter les troubles psychotraumatiques qui en sont la conséquence, e expliquer les mécanismes neuro-biologiques qui en sont à l'origine. Ces conséquences psychotraumatiques restent méconnues, rarement identifiées et presque jamais soignées spécifiquement, pourtant la prise en charge est efficace. Elle évite que des victimes restent abandonnées sans soin pendant des mois, des années, voire des dizaines d'années, aux prises avec une grande souffrance, des angoisses, des états de sidération psychique et de dissociation, un sentiment de danger permanent, et des symptômes incompréhensibles dus à la mémoire traumatique des violences (qui fait revivre les violences à l'identique au moindre lien qui les rappelle avec les mêmes sensations, la même détresse, les mêmes douleurs). Cet abandon les oblige à mettre en place des stratégies de survie, des conduites d'évitement et de contrôle (retrait, phobie, troubles obsessionnels compulsifs) et des conduites d'autotraitement pour s'anesthésier émotionnellement (conduites à risque, mises en danger, addictions). Cet abandon, ces souffrances et cette solitude peuvent aussi les pousser au suicide pour que cet enfer s'arrête enfin. De plus - injustice supplémentaire -les victimes se retrouvent culpabilisées et sommées de se justifier pour ces symptômes, ces conduites et ce mal-être que personne n'explique ni ne relie aux violences et qui de ce fait paraissent incohérents ou illégitimes alors qu'ils sont des conséquences normales des violences (les violences intra-familiales, conjugales et surtout les violences sexuelles ont les conséquences psychotraumatiques les plus fréquentes et les plus graves). Or ces troubles pourraient être facilement compris si les mécanismes psychotraumatiques étaient connus, les victimes pourraient alors être soulagées et déculpabilisées. Les mécanismes neuro-biologiques à l'œuvre lors des violences éclairent aussi le comportement des agresseurs. Ils utilisent la violence comme une drogue pour s'anesthésier émotionnellement et ils instrumentalisent la victime pour lui faire jouer un rôle dans un scénario qui ne la concerne pas, uniquement pour leur propre compte. Les victimes sont toujours innocentes, la violence est toujours incohérente par rapport à ce qu'elles sont et ce qu'elles font. Grâce à des mensonges et à une situation d'inégalité dont ils bénéficient, les agresseurs s'autorisent à exercer une violence totalement illégitime.
J'espère que cette bande dessinée mettant en scène de façon originale et inédite la prise en charge spécialisée d'une jeune femme victime de violences conjugales, contribuera à la prise de conscience que les soins sont essentiels et que toute victime de violence doit pouvoir avoir accès à des soins efficaces et à des informations médicales précises. Ne pas abandonner une victime traumatisée à sa souffrance, la soigner, c'est respecter ses droits, sa valeur et sa dignité. Le traitement sera d'autant plus efficace et rapide qu'il sera précoce (immédiat, dans les 12 heures, il évite la mise en place d'une mémoire traumatique), si les violences durent depuis la petite enfance, il sera plus long et nécessitera tout un travail en profondeur pour libérer et restaurer sa personnalité.
Dr Muriel Salmona
Pour en savoir plus : cf plaquette et le site www.memoiretraumatique.org
Pour commander la BD : http://www.desrondsdanslo.com/EnChemin2.html
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