Oui, si on suppose après Freud que le trauma est sexuel, lié à la façon dont le sujet se confronte à la sexualité. L’enfant va rencontrer ce réel, qui lui échappe, ne serait-ce que parce qu’il découvre sa propre ...jouissance, et comme le suggère le petit Hans, un organe qui n’en fait qu’à sa tête. Trauma d’où s’origine l’angoisse de castration et le symptôme phobique.
Au-delà de cette question qui intéresse tous les enfants, nous tenterons de comprendre avec Lacan pourquoi la sexualité humaine est finalement un « PTSD généralisé », car le traumatisme vient toujours après coup.
Nous nous intéresserons aussi plus précisément à la question du traumatisme langagier, qui affecte tout être parlant du simple fait qu’il commence à parler.
Organisé et animé par Dominique Fabre-Gaudry, psychanalyste, membre de l'ECF avec Eric Zuliani, psychanalysteà Nantes, membre de l'ECF et des membres du groupe "Che Vuoi ?"
Conférence organisée par l'ACF, qui est une émanation de l'ECF, l'Ecole de la Cause Freudienne et du Réseau CEREDA.
Document PDF sur l'ACF :http://www.psychedeclic.com/conferences/
http://www.causefreudienne.net/acf
http://jie2011.blogspot.com/p/cereda_6838.html
RESEAU CEREDA
Les mots du traumatisme
La question du traumatisme chez l'enfant et l'adolescent
Samedi 29 janvier 2011 14h-18h
Université Bordeaux 2 Victoire
05 56 51 24 55
Le choc le plus brutal fut mon premier contact avec les hôpitaux psychiatriques en 1985 lors de mon internat. J’y découvris un univers d'enfermement d'une très grande violence auquel je n’étais pas préparée. D’autant moins préparée qu’une véritable révolution de la psychiatrie s’était pourtant opérée à partir des années 60 qui nous passionnait tous et avait rendue cette spécialité particulièrement attractive. De nombreux intellectuels et psychiatres humanistes tel que Lucien Bonnafé avaient permis que s’impose dans notre société une toute autre vision de la maladie mentale et des soins psychiatriques, beaucoup plus humaine centrée sur la personne en tant que sujet de droit et repensant la « folie » en termes politiques et sociologiques comme le symptôme d’un dysfonctionnement produits par des systèmes aliénants. De plus, la découverte de nouveaux médicaments très efficaces sur les délires - les neuroleptiques - associée à la mise en place d’une sectorisation des soins (avec le développement de soins de proximité dans des centres médico-psychologiques et des hôpitaux de jours) avaient rendus possible une prise en charge des malades mentaux non plus uniquement dans les « asiles », mais aussi « hors les murs », évitant ainsi un enfermement à vie.
Pourtant, malgré ces grandes améliorations, au sein des hôpitaux psychiatriques, la plupart des malades « internés » étaient encore considérés par les médecins comme incurables et n'intéressaient quasiment personne, excepté quand ils présentaient des troubles du comportement gênants qu'il fallait alors calmer à tout prix par des camisoles physiques et chimiques. Et si les asiles avaient changé de nom et s’appelaient des centres hospitaliers spécialisés, les conditions d’hospitalisation restaient effarantes dans des villes-ghettos immenses coupées du monde extérieur où régnaient une grande violence institutionnelle du côté des soignants, et la loi du plus fort au sein de la population des internés, avec des trafics de drogue et d’alcool, des violences sur les personnes les plus vulnérables et une violence sexuelle omniprésente mais jamais dénoncée s’exerçant sur les femmes avec de très nombreux viols et une prostitution clandestine*. Les malades mentaux restaient une population à part, pas comme les autres, pas comme « nous » les soignants, les « sains d’esprit », de fait une « sous-population » de personnes ne bénéficiant pas des mêmes droits, pouvant être privées de liberté sans avoir commis ni crime, ni délit, privées de voir leurs proches, et exposées à de nombreux dangers pour leur « Bien », leur « Sécurité » et leur « Santé ». Les maladies mentales étaient considérées comme « endogènes », c'est-à-dire sans cause extérieure et leur traitement médical consistait essentiellement à en faire disparaître les symptômes les plus voyants et à calmer l'agitation, les crises d'angoisse et les conduites à risques des patients par des soins sédatifs et anesthésiants, mais aussi par de la violence institutionnelle, de l'enfermement, de l'isolement et de la contention*.
Les antécédents de violences subies que je retrouvais chez la grande majorité des patients hospitalisés que je suivais en tant qu’interne n’étaient pas pris en compte. Pourtant il s’agissait de violences très graves, souvent criminelles, jamais dénoncées ni punies : actes de barbarie, tentatives de meurtre, viols incestueux, remontant la plupart du temps à leur petite enfance. Ces antécédents de violences auraient dû au moins faire l’objet de recherches, d’études et être reliés à leur état mental. Les syndromes psychiques post-traumatiques étaient pourtant connus, qu’ils soient nommés suivant les écoles : névroses traumatiques, états de stress post-traumatiques, troubles psychotraumatiques. Mais ils étaient très peu, voire pas du tout enseignés lors des études médicales et de spécialisation en psychiatrie et surtout jamais utilisés comme outils diagnostiques et d’orientation thérapeutique. Les patients en toute injustice étaient condamnés à une vie de souffrance, leurs droits les plus fondamentaux n’étaient pas respectés, et ils se retrouvaient exclus et enfermés alors que les criminels qui les avaient détruits psychologiquement bénéficiaient le plus souvent d’une totale impunité.
Dans ce contexte, la psychanalyse qui prenait en compte l'individu dans sa totalité, avec son histoire, ses perceptions, ses affects, son imaginaire, son inconscient et ses liens relationnels, apparaissait comme un mode de prise en charge beaucoup plus humain. Avec le courant de l’anti-psychiatrie* et l’approche systémique*, elle était la référence de tous ceux qui s'opposaient à la violence de la psychiatrie institutionnelle. Mais, si elle s'intéressait de plus près au malade en tant que sujet, lui donnant la parole, si elle était un outil très séduisant intellectuellement pour interpréter les symptômes et les comportements, en revanche dans sa pratique, elle ne prenait que très peu en compte les violences réelles que les patients avaient pu subir. Elle rapportait leurs souffrances essentiellement à des conflits psychiques intérieurs, en renvoyant le patient à lui-même, à son inconscient, ses pulsions, ses désirs, ses fantasmes sans chercher à lui rendre justice, ni à travailler le lien entre ses symptômes et les violences subies. Pourtant le concept de névrose traumatique développé par Freud particulièrement dans son essai « Au-delà du principe de plaisir » aurait pu être opérant mais il était plutôt réservé à la psychiatrie militaire avec les traumatismes de guerre, ou aux catastrophes civiles.
La déception pour moi était de taille, il m'était impossible d'adhérer à la psychiatrie traditionnelle, violente, uniquement descriptive et symptomatique, et la psychanalyse à laquelle je m'étais formée ne pouvait pas vraiment m'offrir des réponses satisfaisantes. Je trouvais le travail d'analyse avec le patient irremplaçable. La recherche d'une vérité inconsciente cachée derrière les significations et les contenus latents du discours du patient, de ses comportements, de ses lapsus, de ses rêves et de ses symptômes était passionnante et profitable pour le travail psychothérapique. Mais son concept central, le complexe d'Œdipe et la vision freudienne de la sexualité me posaient problème. Tout d'abord j’avais du mal à les reconnaître comme universels, je ne les trouvais ni justes, ni cohérents, que ce soit pour moi, ou pour les patients. Ils me paraissaient dépassés, construits sur une vision sexiste des rapports hommes-femmes et sur une vision catastrophique de la sexualité. Freud envisageait la sexualité comme une pulsion naturellement violente et prédatrice que la civilisation et l'éducation devait arriver à contenir ou à sublimer. Et la jeune sympathisante féministe que j'étais s'insurgeait contre la misogynie tranquille des milieux psychanalytiques qui prenaient comme inhérents aux femmes, des « fantasmes », des traits de personnalité et la nature d'une sexualité dite féminine, sans se poser la question de savoir si ces « caractéristiques féminines » ne pouvaient pas être acquises (tout comme les « caractéristiques masculines »), conséquences de violences sexistes et sexuelles omniprésentes dans la société viennoise du temps de Freud et malheureusement encore bien trop présentes et actuelles dans notre société. De plus, face aux nombreuses situations d'incestes auxquelles je me trouvais confrontée, la référence au complexe d'Œdipe devenait non seulement inopérante mais injuste et insupportable. L'œuvre du psychanalyste Sándor Ferenczi, disciple marginal de Freud, était malheureusement encore très peu diffusée en France, elle avait commencé à l'être seulement au début des années 60 avec les premières traductions de ses œuvres et un article remarqué de Granoff. Ferenczi, en 1932, dans son texte dans « confusion de langue entre adulte et enfant » avait réintroduit la théorie de la séduction de Freud, contre l'avis de ce dernier. En effet, Freud avait abandonné en 1897 cette théorie où il considérait que les « séductions » (c'est-à-dire les agressions sexuelles) que les adultes commettaient sur les enfants étaient une étiologie courante pour les névroses, particulièrement les névroses hystériques. Après cette date, Freud avait remis en cause la réalité des agressions sexuelles commises dans l'enfance de ses patientes, et développé les notions de fantasmes et de complexe d'Œdipe – la sexualité de l'enfant, considérée comme une sexualité traumatisée par l'agression d'un adulte dans la première théorie de la séduction, devenait, dans la nouvelle théorie des pulsions, une sexualité traumatisante pour l'enfant par sa nature elle-même, dans le cadre de conflits entre des instances psychiques – en l'occurrence le moi et le sur-moi. Ferenczi fut le seul disciple direct à reconnaître la réalité et la gravité des traumatismes sexuels – le plus souvent incestueux – subis dans l'enfance de ses patients. Et il a été le premier à se pencher avec une extrême bienveillance sur ces traumatismes sexuels de l'enfance restés en souffrance chez les adultes, à en décrire avec précisions les conséquences, à dénoncer le comportement des adultes face à un enfant traumatisé (note p. 36 de Le traumatisme), et à en proposer une prise en charge novatrice. Mais ses textes sont restés lettre morte pour la majorité des psychanalystes français pendant plus d'un demi-siècle.
Dr Muriel Salmona
Psychiatre - Psychotraumatologue
Responsable de l'Antenne 92 de l'Institut de Victimologie
Présidente de l'Association
Mémoire Traumatique et Victimologie
118 avenue du Général-Leclerc
92340 BOURG LA REINE
06 32 39 99 34
drmsalmona@gmail.com
www.memoiretraumatique.org
2 commentaires:
Bonour,
pour qqun qui a vécu ça, dans sa chair, des années durant, il est visceralement, intuitivement, et logiquement abject d'entendre les raisonnements et les arguments tels que ceux là!!!
et nous savons nous que celà flirte et reproduit certains des critères de la " manipulation perverse"... comme le dit dailleurs bien Dr Salmona ici !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Oui, on se fout des Théories alambiquées à la Freud, ou Lacan, ou peut-importe qui.... car J Renard disait déjà" le savant généralise, mais l'Artiste lui individualise" !car la plupart de ces pseudo-soignants de tout bord, baignent et re-sassent dans leur propre jus depuis des lustres...mais l'ennui c'est qu'ils éclaboussent partout, brouillent les pistes valables, et veulent imposer leur "Menu" avarié !!
Brel disait :" les Passionnés soulèvent le monde, mais les sceptiques le laissent retomber ! Alors, même si ils sont baillonnés par les "monsanto" et autres lobies pharmaceutiques, les nobles graines semées par des :Hirigoyen, Prigent, Desjours,etc...et d'autres comme vous Muriel today... ben sachons que celà ne sera pas vain, que ces graines germeront assuremment,lentement hélas, mais inéluctablement, tel le "Haricot Magique " de Jack, que rien n'arrêtait, jusqu'aux nuages !!
Oui, ces gens là sont obnubilés!!...mais pas par la santé des patients, mais par le fric, le fric qu'ils peuvent en retirer, et en se foutant bien du Trou Noir de la Sécu lol...
De Pr. E. Zarifian , en 19994 déjà : " ...pas même la psychanalyse qui est un pur produit du capitalisme car elle instaure comme unique valeur de référence l'argent" ....
Il croyait pas si bien dire ( page 209 dans " des paradis plein la tête"....!! )
Continuez Muriel, ne lachez rien, enjembant si besoin morts ou bléssés jonchant partout déjà hélas...car now le "terreau" est prêt, des milliers de "apprentis-jardiniers" se rallieront à Vous,oui la Mancha refleurira !!!....
Bonjour,
Attention à ne pas faire d'amalgames. Le thème peut être lu de plusieurs façons! Vous êtes dans la fantasmatisation. Pour philippe je conçois et j'entends sa souffrance qui trouve un réceptacle trop opportun dans les propos tenus ici. Quant à la psychiatre, si un texte seul vous permet de tirer de telles conclusions sans tenir compte du contexte, des connaissances de l'auteur, du développement de sa pensée, bref, de tout ce qui rend compte de l'essence de son propos, alors, je m'inquiète de savoir quelle pratique est la votre. Vous alimenter les fantasmes d'internautes en difficultés ainsi que les vôtres de psychiatre engagée. Je trouve grave que vous ne puissiez pas vous dégager de vos représentations et de vos névroses afin de proposer une critique constructive basée sur un échange d'idées avec l'auteur du texte. Vous faites des conclusions, il me semble, hâtives et mettez en danger tout ce que nous, praticiens de l'homme, tentons de mettre en oeuvre chaque jours; c'est à dire décoller les passions de la raison afin de les articuler vers un mieux vivre à soi et aux autres. Toutefois ma critique se pose dans le même écueil que la votre. On ne peut juger de la teneur d'une pensée à partir d'un simple texte condensé dans lequel toutes les passions refoulées ou non maîtrisées, je dirais même débordantes, peuvent se projeter. Ainsi ce serait avec plaisir que je me rendrai à cette conférence et j'espère vous y croiser pour que nous puissions échanger dans une conversation réelle et non fantasmer devant un écran virtuel.
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