LE PLUS. L'agression d'une jeune femme dans le métro de Lille et surtout le fait que personne ne lui vienne en aide ont choqué les Français. Comment expliquer la réaction des passagers de la rame ? Comment peut-on ne rien faire alors qu'une personne est en train de se faire agresser ? Muriel Salmona, psychiatre, nous éclaire.
Muriel Salmona, psychiatre, présidente de l'association Mémoire Traumatique et Victimologie ,
publié le 26-04-2014
Nous sommes sous le choc de cette information concernant une jeune femme qui a été agressée sexuellement à Lille dans le métro sous le regard de nombreux passagers par un homme ivre sans que personne ne vienne à son secours, ni n’appelle la police.
Malgré ses appels à l’aide, elle a dû se protéger seule comme elle pouvait, fuir hors du métro toujours poursuivie par cet homme qui menaçait de la violer, en plus des agressions sexuelles qu’il avait déjà commises, et ce n’est que dans la rue qu’elle a enfin pu être protégée par un automobiliste qui l’a laissée monter dans sa voiture et par des vigiles qui ont finalement maîtrisé l’agresseur.
Pourquoi n'ont-ils prévenu personne ?
Comment est-il possible qu’aucun des témoins de cette scène d’agression ne soit à aucun moment intervenu, on les voit même sur les enregistrements vidéo, d’après la police, se retourner et s’éloigner malgré les appels à l’aide de la jeune femme. Il s’agit manifestement de non-assistance à personne en danger.
Que tous ces témoins aient eu peur d’intervenir face à un homme visiblement très agressif et alcoolisé, par peur de prendre un mauvais coup, cela pourrait se comprendre, mais pourquoi ne pas avoir appelé la police ou ne pas avoir prévenu des responsables du métro, alors qu’ils avaient tous un téléphone portable ?
De nombreux cas semblables
Mais est-ce aussi exceptionnel que cela ? Rappelons-nous que Le Collectif Féministe Contre le Viol (CFCV) s’est constitué en 1985 dans la région parisienne pour réagir contre deux viols commis dans les lieux publics : le métro et le RER, devant des témoins passifs. Et c’est ainsi que le 8 mars 1986, grâce à l’appui financier du Ministère des Droits des Femmes, le CFCV a ouvert une permanence téléphonique.
Depuis, il y a eu d’autres "faits divers" qui nous ont également confronté à cette absence de réaction face à des agressions sexuelles ou à des viols dans l’espace publique.
Et j’ai de nombreuses patientes à qui c’est arrivé, je pense particulièrement à une jeune femme de 20 ans qui avait été séquestrée et violée, qui avait pu s’enfuir, et qui, poursuivie dans la rue par l’agresseur, ensanglantée, les habits déchirés et cherchant désespérément de l’aide, n’avait été secourue par personne alors que la scène se situait boulevard Rochechouart à 19h, avec une foule de passants.
Ces derniers s’étaient tous détournés, et quand l’agresseur l’a rattrapée par les cheveux en lui proférant les pires menaces et qu’elle a hurlé, personne n’a réagi. Elle a réussi à s’enfuir à nouveau et à traverser le boulevard en essayant d’arrêter des voitures, mais les conducteurs ont continué à rouler, elle n’a dû son salut qu’à un autobus qui démarrait et dans lequel elle a pu sauter…
Dans le film Chaos, Coline Serreau met en scène une situation similaire.
Plus il y a de témoins, moins ils agissent
De quoi s’agit-il ? D’indifférence, d’absence totale de solidarité, de lâcheté, d’égoïsme ? Cela paraît tellement incroyable… que l’on a du mal à y croire. Pourrait-il s’agir seulement de peur, de sidération ?
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