samedi 27 avril 2013

À écouter sur RFI l'émission Géopolitique, le débat de Marie-France Chatin : La violence éducative à l'occasion de la journée de la non-violence éducative avec Céline Raphaël, Muriel Salmona, Olivier Maurel




89 FM


Emission Géopolitique le débat 
du 28 avril 2013 à 
de Marie-France Chatin
de 19:30 mn


Émission en 2 parties à écouter ICI

Le 30 avril 2013 est la journée de la non-violence éducative. Selon l’Unicef, 86% des enfants âgés de 2 à 14 ans dans le monde, sont soumis à des châtiments corporels et/ou à des agressions psychologiques. Comment la connaissance de la violence éducative éclaire-t-elle la violence humaine dans le monde ?

Invités :
- Céline Raphaël, auteur de « La démesure. Soumise à la violence d’un père » éd. Max Milo.
- Muriel Salmona, présidente de l’Association Mémoire Traumatique et Victimologie. « Le livre noir des violences sexuelles » éd. Dunod.
- Olivier Maurel, co-fondateur de l’Observatoire de la violence éducative ordinaire ou OVEO. « La violence éducative : un trou noir dans les sciences humaines » éd. L’Instant Présent.

Muriel Salmona :
"Pour rappel 33 pays ont aboli tout châtiment corporel et toute violence psychologique éducative y compris dans la famille dont 22 pays européens, mais pas encore la France : pour en savoir plus aller sur le site Endcorporalpunishment sur ce LIEN


South Sudan (2011) , Albania (2010) Congo, Republic of (2010) Kenya (2010) Tunisia (2010) Poland (2010) Liechtenstein (2008) Luxembourg (2008) Republic of Moldova (2008) Costa Rica (2008) Togo (2007) Spain (2007) Venezuela (2007) Uruguay (2007) Portugal (2007) New Zealand (2007) Netherlands (2007) Greece (2006) Hungary (2005) Romania (2004) Ukraine (2004) Iceland (2003) Germany (2000) Israel (2000) Bulgaria (2000) Croatia (1999) Latvia (1998) Denmark (1997) Cyprus (1994) Austria (1989) Norway (1987) Finland (1983) 
Sweden (1979)


L'éducation des enfants s'apparente le plus souvent à un dressage, dans lequel « une violence éducative ordinaire » est tolérée, ressentie comme normale, voire indispensable par le plus grand nombreEn Europe, 60 % à 90 % des parents approuvent les châtiments corporels comme méthode éducative. Et si les violences physiques sont maintenant interdites à l'école, les violences psychologiques, les menaces, les paroles blessantes et les humiliations y restent monnaie courante. À l'intérieur de la famille, le recours à des violences physiques reste encore toléré en France, « tant qu'elles restent adéquates et modérées ». Pourtant, 33 États dont 22 États membres européens ont interdit en 2011 tout châtiment corporel, y compris dans la famille, la Suède en 1979 a été le premier pays au monde a adopter cette législation, ce qui a permis d’inverser totalement le rapport des adultes aux châtiments corporels, puisqu’ils sont actuellement très majoritairement contre.
Quand on observe les raisons pour lesquelles l'enfant est frappé dès son plus jeune âge, c'est parce qu'il pleure trop, qu'il ne veut pas manger, qu'il refuse de se laisser habiller, qu'il n'arrive pas à dormir, qu'il ne veut pas arrêter de jouer, qu'il ne veut pas rendre un objet ou le ranger, qu'il essaie d'obtenir ce qu'il veut, qu'il n'obéit pas, qu'il dit ce qu'il ne faut pas, qu'il a fait tomber quelque chose, qu'il parle trop, qu'il bouge trop, qu'il n'arrive pas à comprendre ce qu'on lui dit ou ce qu'on veut lui faire apprendre, parfois même c'est parce qu'il s'est fait mal, qu'il s'est mis en danger, a échappé à la surveillance de l'adulte… Et tout cela serait tellement grave, tellement pervers que cela nécessiterait des punitions corporelles ? À l'évidence tout cela est beaucoup plus grave aux yeux des adultes que ne le sont toutes les transgressions, négligences, voire délits que les adultes commettent souvent tranquillement devant leurs enfants : il est interdit à l'enfant de désobéir mais l'adulte peut devant ses enfants transgresser le code de la route, faire un excès de vitesse, conduire en état d'ébriété, se garer n'importe où, lui il peut, personne ne va le frapper, à la rigueur il sera verbalisé s'il est pris ! L'adulte peut ne pas avoir faim, ne pas avoir envie de dormir, mal se tenir à table, proférer des injures ou dire des « gros mots », ne pas être suffisamment en forme pour se concentrer, lui a le droit, lui a des bonnes raisons, l'enfant non !
Par la mauvaise magie de la mémoire traumatique de l'adulte, qui remet en scène les violences subies dans l'enfance et les discours de ses propres parents qui les accompagnaient, tout ce que fait cet enfant va être perçu comme venant d'une mauvaise intention, pour énerver l'adulte, pour lui pourrir la vie. L’enfant est dramatiquement perçu comme fondamentalement mauvais, agressif, provocateur, prêt à « pousser de travers » si on ne le redresse pas à temps.
Ne nous y trompons pas, les premières violences et l'expérience de leur qualité auto-traitantes, si elles ne font pas suffisamment horreur pour être aussitôt contrôlées, risquent fort d'être la porte ouverte ensuite à bien d'autres violences de plus en plus extensives, dont des violences sexuelles, l'enfant pouvant dans un premier temps être attaqué lors des allumages de la mémoire traumatique, du fait de liens avec un passé qui ne le concerne pas, celui de ses parents. Dans un deuxième temps, par le jeu à la fois de phénomènes addictifs de dépendance et de tolérance à la violence, on fera jouer à l'enfant « bouc émissaire » le rôle de médicament efficace, de disjoncteur réarmable à l'infini, et même de « traitement préventif » pour toutes les angoisses, stress ou frustrations qui n'ont rien à voir directement avec l'enfant mais qui « allument » eux aussi la mémoire traumatique du parent agresseur. Le système peut s'emballer et devenir contaminant, l'enfant devenant le disjoncteur au service de tout le monde, avec une absence totale de compassion toujours liée à l'anesthésie émotionnelle de tous.
En laissant perpétuer des violences « ordinaires » sur les enfants, la société porte une lourde responsabilité puisque ces violences font le lit de violences futures et notamment de violences sexuelles. Et elle se positionne de façon particulièrement hypocrite, en s'étonnant de la violence de jeunes adolescents et de leurs conduites dissociantes à risques, sévèrement condamnées alors qu’elles sont directement issues des violences subies. Les violences et les troubles des conduites et du comportement des adolescents sont considérés comme bien plus graves que ceux des adultes, et la plupart du temps on ne se pose aucune question sur les violences familiales qu’ils ont pu subir. On considérera même qu'il s'agit d'enfants et d'adolescents-rois, à qui on a laissé tout faire sans aucune limite et qui n'ont pas été assez punis !
Comble de malhonnêteté, il arrive même que l'on donne à ces adolescents le contre-exemple de victimes exemplaires qui ne font pas de vagues et continuent à donner l'impression d'aller bien en ne dérangeant personne, « contre-exemples » résilients qui auraient même bénéficié, selon eux-mêmes, de ces violences qui les auraient « forgés », quel « merveilleux malheur ». Mais on omet de dire le prix de la résilience : soit un sacrifice total, la victime par loyauté familiale se taira et cachera très soigneusement toutes les conséquences ; soit une anesthésie émotionnelle totale induite par des violences répétées et continues ou par des conduites dissociantes à risque. Rarement la victime a eu une chance extraordinaire, le « couteau » n'ayant touché aucun vaisseau, aucun organe. Ces victimes résilientes se rassurent ainsi sur leur intégrité et leur non-condition de victimes. L'enjeu de tout cela, c'est de prouver que les violences ne sont pas graves pour tout le monde, qu'elles peuvent ne pas avoir de conséquences.
En France, les enfants restent ainsi les seules personnes que la loi ne protège pas entièrement des violences physiques, mêmes les détenus ne doivent subir aucune violence physique selon la loi, cherchez l'erreur ! Pourtant la France est signataire de la Convention des Droits de l'enfant du 20 novembre 1989 et elle s'est engagée à lutter contre toutes les formes de violence à l'encontre des enfants. En juin 2009, elle s'est d'ailleurs fait rappeler à l'ordre par le Comité des Droit de l'enfant à Genève, qui lui demande expressément dans son rapport « d'interdire explicitement par la loi tous les châtiments corporels dans tous les environnements incluant la famille, l'école, les institutions et les autres centres de soins de l'enfance, de favoriser le développement et la prise de conscience à ce sujet et de faire les efforts nécessaires pour promouvoir les valeurs d'une éducation non violente ». Car on le sait aujourd’hui : cette « violence éducative ordinaire » tolérée est un facteur de risque de maltraitance, ainsi qu’une véritable usine de fabrication de syndromes psychotraumatiques et de violences futures."

Voir également l'article que j'ai écrit sur la violence envers les enfants sur le site ICI http://memoiretraumatique.org/memoire-traumatique-et-violences/violences-faites-aux-enfants.html


Voir également l’interview dans 20mn de Céline Raphaël sur son livre "La démesure. Soumise à la violence d'un père" : http://www.20minutes.fr/societe/1081547-celine-raphael-je-ecrit-livre-regler-comptes








Aucun commentaire: