jeudi 21 décembre 2023

LA CIIVISE DOIT RESTER LA CIIVISE Avec la même indépendance, la même doctrine, le même président pour continuer son travail au service des victimes de violences sexuelles dans l'enfance


 LA CIIVISE DOIT RESTER LA CIIVISE 

Avec la même indépendance, la même doctrine "Je te crois, je te protège" et avec le juge Edouard Durand pour continuer son travail au service des victimes et de leurs droits à la vérité, à la protection, aux soins, à la justice, à  la réparation et à la garantie de non réitération. 


SAUVONS LA CIIVISE ET SA DOCTRINE 

« JE TE CROIS, JE TE PROTÈGE »


Exigeons que le juge Edouard Durand soit maintenu à sa tête et que ses 82 préconisations soient appliquée 

#SoutienCiivise  #StopImpunité #Imprescriptibilité #MetooInceste


Muriel Salmona, psychiatre, présidente de l’association Mémoire Traumatique et Victimologie, le 21 décembre 2023




Comment est-il possible que le gouvernement décide d’enterrer la CIIVISE (Commission indépendante inceste et violences sexuelles faites aux enfants) à la veille de l’anniversaire du mouvement historique #Metooinceste de janvier 2021 ! Alors que les trois années de travaux de la CIIVISE et ses 82 préconisations ont été unanimement salués et qu’elle a su créer un mouvement de confiance et d’espoir inédit pour des dizaines de milliers de victimes de violences sexuelles dans l’enfance, une nouvelle comission va lui être substituée, une commission qui n’aura plus de CIIVISE que le nom, sans le juge Edouard Durand qui en était le représentant et le garant, et avec une feuille de route rétrécie sans aucune garantie sur la continuité de sa doctrine et de son indépendance ? Nous avons vécu cette décision comme une trahison et nous sommes particulièrement inquiets et en colère.


La CIIVISE a été mise en place en mars 2021 par Adrien Taquet, secrétaire d’Etat à l’Enfance et à la Famille, dans la foulée du mouvement #Metooinceste, à la suite de la sortie du livre de Camille Kouchner La familia grande et en remplacement d’une première commission sur les violences sexuelles faites aux enfants présidée par Elisabeth Guigou qui en avait démissionné après l’affaire Duhamel. 


Cette commission co-présidée par le juge Edouard Durand et Nathalie Matthieu directrice générale de l’association Docteurs Bru et dont j’ai été l’une des 23 membres permanentes, est devenue tout au long de ses trois années de fonctionnement, l’essence même du mouvement de libération de la parole des victimes d’inceste et d’autres violences pédocriminelles et a suscité auprès des victimes un formidable espoir. Elle a fait l’unanimité avec son travail colossal, ses 30 000 témoignages, ses innombrables auditions publiques de victimes, d’expert.e.s, ses enquêtes (dont le coût du déni), son kit de formation des professionnels « Melissa et les autres », son rapport de 700 pages et ses 82 préconisations remis au gouvernement le 17 novembre et publiquement le 20 novembre à la Maison de la radio sans qu’aucun membre du gouvernement n’y assiste (cf le rapport complet et sa synthèse téléchargeable en fin d’article et le lien vers la vidéo de la présentation publique).


La feuille de route de cette commission décrivait lors de la mise en place de la CIIVISE, en mars 2021, deux objectifs principaux : 

  • recueillir des témoignages de victimes pour connaître et faire connaître l’ampleur des violences sexuelles faites aux enfants, leurs mécanismes  et leurs conséquences notamment traumatiques sur la santé des victimes, et pour sensibiliser la société ainsi que les professionnels au contact des enfants ;
  • Formuler des recommandations pour renforcer la culture de la prévention et de la protection dans les politiques publiques pour renforcer la prévention des violences sexuelles faites aux enfants, mieux protéger et accompagner les victimes, mieux sanctionner les agresseurs et améliorer leur prise en charge.Une attention particulière sera apportée de manière transversale à la protection des enfants en situation de handicap.


Toute notre activité, notre rapport et nos préconisations démontrent à quel point nous avons respecté totalement ces objectifs pendant ces trois années, mais le chantier est si énorme que ce travail est très loin d’être terminé. Face à la gravité et l’ampleur de ces violences sexuelles et de leurs conséquences psychotraumatiques, la lutte contre des siècles de déni, de loi du silence, de mépris et de culpabilisation des victimes, de théories anti-victimaires, d’impunité ne peut se concevoir que dans le long terme et dans le cadre d’une pérennisation de nos travaux. Il est évident, alors que nous sommes nombreux.ses à nous battre depuis des décennies contre ces violences, que ce n’est que dans une continuité, une détermination et une culture commune de la protection et du soin, du respect de l’égalité et des droits et de la dignité des personnes, de la lutte contre les discriminations et des abus de vulnérabilité et une formation de longue haleine de tous les professionnels, qu’il sera possible d’améliorer la prévention de ces violences, la protection et la prise en charge des victimes et de lutter efficacement contre ces violences sexuelles et leur impunité. 


La non-reconduction par le gouvernement du juge Edouard Durand à la présidence de la CIIVISE, son remplacement et le changement de feuille de route a été incompréhensible. Edouard Durand qui a travaillé et dirigé à plein temps cette commission avec Nathalie Matthieu pendant ces trois années, a été le porte parole des victimes qui ont témoigné à la CIIVISE et le garant de la doctrine de cette commission « je te crois, je te protège ». Il souhaitait continuer cette mission (Nathalie Matthieu ayant prévenu depuis plusieurs mois qu’elle voulait pour sa part reprendre ses activités professionnelles à plein temps) et qu’une grande majorité des membres avait demandé qu’il soit reconduit dans son mandat (cf notre lettre du 12 novembre 2023 envoyée à Charlotte Caubel qui ne nous a jamais répondu). 


L’absence d’information et de concertation dans lesquelles les co-présidents et nous-mêmes, les membres de la CIIVISE,  avons été maintenus depuis la remise du rapport et la façon dont nous avons été prévenus de la nomination d’un de nos membres en tant que nouveau président Sébastien Boueilh et d’une ex-membre démissionnaire la Dre Caroline Rey Salmon en tant que vice-présidente et de la mise en place d’une nouvelle commission nous a beaucoup choqué. Nous l’avons appris Lundi 11 décembre après-midi par la presse puis par un mail de Sébastien Boueilh. 


Et c’est ensuite, sans un mot pour les 30 000 victimes qui ont témoigné mais en saluant la qualité des travaux de la CIIVISE, que Charlotte Caubel a présenté le jour suivant dans la presse cette nouvelle CIIVISE comme une instance de suivi pour appliquer les préconisations de notre rapport sans budget pré-déterminé (elle avait refusé que les parlementaires votent le budget dédié qu’ils avaient prévu) avec une nouvelle feuille de route pour laquelle l’inceste, le recueil et l’étude des témoignages des adultes ayant été victimes de violences sexuelles dans l’enfance ne seront plus le sujet, mais qui se concentrera sur d’autres sujets que nous n’aurions pas abordé selon elle - ce qui est faux - à savoir les enfants victimes d’aujourd’hui, les enfants en situations de handicap, les enfants en situation prostitutionnelle, la pédocriminalité  en ligne, les mineurs agresseurs. Il est à remarquer que pour tous ces « nouveaux » sujets l’inceste est central et majoritaire et est le « fournisseur » principal de la prostitution infantile et de la pédocriminalité en ligne, et il est important de rappeler que non, son gouvernement n’est pas le premier à avoir parlé d’inceste, que des lois ont été votées depuis 2010 nommant l’inceste et qu’en mars 2017 la ministre des Droits des femmes, des Enfants et de la Famille, Laurence Rossignol, avait fait du renforcement des connaissances sur l’inceste une priorité, lors du premier plan interministériel triennal de lutte contre les violences faites aux enfants.


Mais ce sont les mensonges de Charlotte Caubel lors d’une interview avec Sébastien Boueilh sur RTL le 13 décembre, puis les propos du futur président et de la vice-présidente de la nouvelle commission dans Médiapart qui ont fait déborder la coupe et mis en colère la majorité des membres permanents de la CIIVISE. Charlotte Caubel a prétendu avoir entendu TOUS les membres de la commission - ce qui est totalement faux - et a tenté de nous instrumentaliser en prétendant que des membres ne voulaient pas continuer avec la CIIVISE telle qu’elle était. Les futurs président et vice-présidente dans Médiapart ont remis en question le caractère trop féministe de la commission (alors que 87% des victimes sont des filles et 96% des agresseurs des hommes et des garçons, en 2021 j’avais écrit une lettre ouverte au Garde des Sceaux et au secrétaire d’Etat à l’Enfance pour leur rappeler l’importance de la prise en compte de la dimension sexiste de ces violence et le risque si ce n’était pas le cas de discrimination) et la doctrine de la CIIVISE sur « je te crois », se référant de façon stupéfiante à Outreau et aux mensonges des enfants (qui pour les enfants d’Outreau faut-il encore le rappeler ont été bel et bien reconnus comme victimes viols et de mise en situation prostitutionnelles), sans compter leurs positions connues sur le maintien de la prescription pénale pour Sébastien Boueilh, et, la non obligation de signalement des professionnels de la santé pour la Dr Caroline Rey Salmon (ce qui a été l’objet de sa démission de la CIIVISE en mars 2023). De plus, aucune garantie d’indépendance et de continuité du travail de notre commission et encore moins de notre doctrine ne nous a semblé réunies. Cela a suscité chez nous un tel choc et une telle colère que douze d’entre nous, ont décidé de démissionner : je fais partie de ces douze démissionnaires (cf lettre et communiqué du 14 décembre 2023 à lire en annexe). Et nous continuons à ce jour de subir une désinformation de la part de Charlotte Caubel qui a prétendu que 9 membres de la CIIVISE avaient durant ces trois années claqué la porte en raison de différents sur son fonctionnement, ce qui est faux, seuls deux membres ont démissionné, deux médecins, le Dr Guillaume Brossard fin 2021 et la Dre Caroline Rey Salmon en 2022 en raison de différents et de leur opposition au signalement obligatoire par les médecins. D'autres membres pour des raisons de charges professionnelles ou de situations personnelles n'ont pas pu continuer à participer aux réunions et sous-commissions de travail (qui nécessitait sur 3 ans un gros engagement).


Un rappel du contexte de la création de la CIIVISE me paraît utile. Après le raz de marée de #MetooInceste et ses 80 000 témoignages postés sur twitter tweets le week-end du 16 et 17 janvier 2021, il a fallu 7 jours pour que le président Emmanuel Macron réagisse dans une vidéo postée sur twitter le 23 janvier en prenant la mesure de l’ampleur historique de ce mouvement et en reconnaissant l’urgence d’agir et la nécessité d’un changement radical de société. Il s’est engagé auprès des victimes de violences sexuelles dans l’enfance à les entendre, à les protéger et à ne laisser aucun répit aux agresseurs, et donc à lutter contre l’impunité qui prévalait jusqu’à aujourd’hui. Il a tenu des paroles fortes : « On est là. On vous écoute. On vous croit. Et vous ne serez plus jamais seuls ». « Ces témoignages, ces paroles, ces cris, plus personne ne peut les ignorer. Contre les violences sexuelles faites à nos enfants, c’est aujourd’hui à nous d’agir. Il s’est engagé auprès des victimes de violences sexuelles dans l’enfance à les entendre, à les protéger et à ne laisser aucun répit aux agresseurs, et donc à lutter contre l’impunité qui prévalait jusqu’à aujourd’hui. Et Monsieur Adrien Taquet le Secrétaire d’État à l’Enfance et aux familles a renchéri en déclarant « Il est temps de répondre à l’urgence du changement mais également de rompre avec le déni et le silence sur lesquels notre société s’est en partie construite ».


Nous nous sommes dit qu’il en avait fallu du temps, et une détermination sans faille des victimes et de toutes celles et ceux qui les défendent, pour que l’ampleur et la gravité de cette pédocriminalité soit enfin reconnue, et qu’en protéger tous les enfants, se porter au secours de ses victimes, les prendre en charge, leur rendre justice et lutter contre son impunité soit considéré comme une urgence et une priorité politique.


Et nous avions prévenu : il n’est pas question de nous décevoir, nous avons tant attendu. Les droits des victimes de ces crimes qui ont été tant piétinés, doivent enfin être intégralement respectés. Il s’agit d’une urgence, des milliers d’enfants sont à l’heure actuelle en train de subir ces crimes. Tout doit être fait pour protéger les enfants de ces actes cruels dégradants et inhumains comme les qualifie la Cour européenne. Secourir les enfants qui en sont victimes, les prendre en charge, leur offrir les soins nécessaires, leur rendre justice est un impératif humain absolu. Lutter contre l’impunité de ces crimes, poursuivre et punir les pédocriminels et de les empêcher de réitérer ces crimes est une obligation.


Et bien c’est fait nous sommes déçu.e.s ! Nous avons le sentiment d’avoir été trahi.e.s, et que les victimes de violences sexuelles sont à nouveau relégué.e.s au silence ! 


Mais nous n’allons pas baisser les bras, la lutte continue. Les témoignages toutes les victimes de violences sexuelles dans l’enfance, les enfants qui subissent des violences sexuelles jour après jour nous obligent. Chaque enfant doit être protégé de ces violences. La doctrine de la CIIVISE « Je te crois, je te protège » doit être appliquée, tout enfant qui révèle des violences sexuelles doit être secouru et bénéficier d’une protection, il doit être protégé de toute réitération, mis en sécurité, accompagné, soigné, et avoir accès à la justice et à des réparations. Tous les agresseurs doivent être poursuivis et jugés.


Nos 82 préconisations doivent être mises en œuvre dont beaucoup de toute urgence comme le dépistage systématique, l’obligation de signalement pour tous les professionnels et leur protection, l’ordonnance de sécurité pour les enfants, le retrait de l’autorité parental du parent mise cause par l’enfant, la protection du parent protecteur et des professionnels qui signalent, des l’accès à des soins spécialisés accessibles et gratuits par des professionnels formés en urgence, et tout au long du parcours des victimes (l’absence de protection et de soins spécialisés du psychotrauma représentent une énorme perte de chance pour la santé et la vie des victimes), etc., etc.


La lutte contre l’impunité impose une formation spécifique de tous les professionnel.les en contact avec les enfants, une information des victimes sur leurs droits, sur la loi, sur les conséquences psychotraumatiques des violences, une réforme des enquêtes policières et des procédures judiciaires ainsi que des tribunaux spécialisés et une imprescriptibilité .



Comme je l’écrivais en 2021 au Président  dans une lettre ouverte  après sa vidéo sur twitter en février 2021 : « Il s’agit d’ouvrir enfin les yeux et de ne plus jamais les refermer sur ces crimes et de les reconnaître à hauteur de ce qu’ils sont : des actes inhumains d’une grande barbarie. Il s’agit de reconnaître l’intentionnalité destructrice des pédocriminels qui jouissent de terroriser des enfants, de les réduire à néant, de les déporter de leur enfance et d’en faire des objets à exploiter sexuellement, de les dégrader et de les salir, de les terroriser, de les faire basculer dans un univers où tout leurs repères disparaissent où leurs besoins les plus fondamentaux sont piétinés.


Il s’agit d’entendre les victimes et non plus seulement leurs agresseurs tout- puissants qui ont imposé un discours mystificateur et une propagande anti-

 victimaire très efficace pour effacer ou maquiller leurs crimes et pour bâillonner les victimes, et faire de celles qui essayaient malgré tout de dénoncer ce qu’elles avaient subi, des coupables ou des personnes n’ayant aucune valeur ni aucune légitimité. Ces discours se sont imposés grâce à l’impunité quasi-totale dont les pédocriminels ont bénéficié et ont gangréné notre société qui a développé une inconcevable tolérance vis à vis de ces crimes avec une culture du déni et du silence, et des stéréotypes sexistes et des représentations mystificatrices des victimes qui leur ont vision très négative.


La tolérance vis à vis de la pédocriminalité, son impunité, la propagande anti- victimaire dominante et sa culture du viol qui ont fait des victimes des coupables et des êtres humains ayant moins de valeur que leurs agresseurs, ont rendu notre société irrespirable, il est plus que temps de les dénoncer et

de leur mener une guerre sans merci.


Ces violences sexuelles commises sur les enfants sont de très graves violations des droits humains, de plus en plus assimilés à de la torture en droit international. Extrêmement destructrices et traumatisantes, elles sont à l’origine de graves atteintes à la dignité et à l'intégrité physiques et mentales des victimes qui vont avoir, si les victimes ne sont pas protégées et soignées de très lourdes conséquences à long terme sur la santé mentale et physique des victimes et sur toute leur vie. Ce sont également des violences sexistes et discriminatoires qui aggravent les inégalités et entraînent un risque important de précarité. Le fait que l'Etat ne remplisse pas ses obligations entraîne une perte de chance énorme pour les victimes et une mise en danger de tous les enfants.


Le chantier est énorme et nécessite une réponse politique forte à la hauteur de l’enjeu de société et de santé publique que représentent les violences sexuelles faite aux enfants avec de très importantes réformes et tous les moyens humains et financiers nécessaires


Mais pour opérer un changement radical, l’État ne peut pas faire l’économie de se remettre en question et de reconnaître la faillite totale de toutes ses institutions et les fautes graves dont il est responsable.


L’État a failli à toutes ses obligations internationales, à savoir celles de prévenir ces violences, protéger et prendre en charge les victimes et punir les agresseurs. Un état des lieux de cette faillite de toutes nos institutions accompagné d’une analyse précise de ses causes est indispensable afin d’y remédier et d’en assumer la responsabilité.


Et il va falloir rendre des comptes et réparer toutes les victimes qui ont été abandonnées, mises en danger, laissées pour compte, sans protection, sans prise en charge ni soins, sans justice ni réparation : leurs droits ont été piétinés et elles ont subi une cascades d’injustices, de lourds préjudices et une scandaleuse perte de chance en terme de santé et d’intégration sociale. Et il faudra rendre hommage à toutes ces victimes survivantes.


Dre Muriel Salmona



Pétition pour le maintien pour le maintien de la CIIVISE avec Nathalie Mathieu et Edouard Durand qui a recueilli plus de 14 000 signatures

https://www.mesopinions.com/petition/enfants/maintien-ciivise-nathalie-mathieu-edouard-durand/221512


Pour lire le rapport complet de la CIIVISE « Violences sexuelles faites aux enfants « On vous croit » à télécharger : https://www.ciivise.fr/wp-content/uploads/2023/11/VERSION-DEF-SUR-LE-SITE-1611.pdf


La synthèse du rapport « Violences sexuelles faites aux enfants « On vous croit » à télécharger : https://www.ciivise.fr/wp-content/uploads/2023/11/Synthese-VF.pdf


Prise en charge des conséquences des violences sexuelles subies dans l’enfance sur la santé des victimes : un impératif humain et une urgence de santé publique (dossier CIIVISE) http://stopauxviolences.blogspot.com/2022/04/prise-en-charge-des-consequences-des.html


La lettre ouverte au président du 6 février 2021 : https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/20210206-a_Mr_le_President_de_la_Republique_MeTooInceste.pdf


La lettre ouverte à messieurs les ministres, M. Eric Dupond-Moretti et M. Adrien Taquet du 21 février 2021 : https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/20210224_lettre_a_Dupond-Moretti_et_A-Taquet.pdf


Manifeste contre l’impunité des violences sexuelles avec 9 mesures demandées et une pétition co-signée par 29 associations et qui a reçu plus de 116 100 signatures : https://manifestecontrelimpunite.blogspot.com


Manifeste pour l’imprescriptibilité des crimes sexuels (près de  75 800 signataires et 27 assos co-signataires) à signer ICI https://manifesteimprescriptibilite.blogspot.com


Campagne Stop au Déni 2023 Stop à la mise en danger des victimes de violences intra-familiales et sexuelles : Pour une culture de la protection et du soin Et ses 15 mesures urgentes à mettre en place  20 160 signataires https://www.mesopinions.com/petition/politique/stop-mise-danger-victimes-violences-intra/208995


dimanche 12 novembre 2023

Campagne #StopPrescription : Pour une imprescriptibilité des crimes sexuels sur mineur.es et personnes en situation de vulnérabilité

          

CAMPAGNE STOP PRESCRIPTION

Pour une imprescriptibilité des crimes sexuels sur mineur.es et personnes en situation de vulnérabilité 



Rappelons que la prescription de l'action publique constitue une exception péremptoire et d'ordre public : elle ôte aux faits tout caractère délictueux et criminel. Une fois passé le délai prévu par la loi, la prescription interdit donc aux victimes de violences de poursuivre au pénal leurs agresseurs pour les crimes et délits qu’ils ont commis, et d’obtenir justice.

Si pour toutes les victimes la prescription est injuste et représente une atteinte à leurs droits, dans le cas des viols et des agressions sexuelles sur mineurs elle s’avère particulièrement injuste, cruelle et inhumaine. De plus elle est un facteur de risque très important de réitération des crimes et délits qui met en danger tous les enfants et en péril la société dans son ensemble.

En effet :

  • l’ampleur de ces violences qui en font des crimes de masse, 1 fille sur 5 et 1 garçon sur 13 subissent des violences sexuelles (OMS, 2014) et on estime qu’au moins 160 000 enfants subissent des violences sexuelles chaque année (Ifop/:CIASE, 2021) mais en croisant les données sur les viols (94 000 femmes sont violées chaque année) ce serait 130 000 filles et 35 000 garçons qui subiraient des viols chaque année ;
  • leur caractère discriminatoire, sexiste et particulièrement cruel, dégradant et inhumain, les victimes étant très majoritairement des filles (83%) et des personnes particulièrement vulnérables : 50% des victimes ont moins de 10 ans, les enfants en situation de handicap sont presque 5 fois plus victimes de violences sexuelles et même jusqu’à 6 fois plus de violences sexuelles en cas de handicap mental ou neuro-developpemental (Sullivan, P. M. et Knutson, F., Child Abuse & Neglect, 2000), les femmes autistes sont 88% à avoir subi des violences sexuelles dont 74% avant l’âge de 18 ans et 56% ayant l’âge de 15 ans (Cazalis, Reyes, Leduc, Gourion,Front. Behav. Neurosci, 2022), et plusde 90% des auteurs des hommes (MTV/ Ipsos, 2019) ;
  • le fait que ces violences soient commises dans plus de 90% des cas par des proches, et dans près de la moitié des cas par un membre de la famille (et même dans 54% en cas de viols incestueux (MTV/ Ipsos, 2019) ;
  • le fait que règnent un déni massif, une loi du silence, et une culture du viol omniprésente qui invisibilisent ou minimisent les violences, culpabilisent et font taire les victimes et disculpent les agresseurs, les victimes mettent plus de 12 ans à parler après les faits (14 ans en cas de viols) (MTV/ Ipsos, 2019) ;
  • l’absence généralisée de secours, de protection et de soins spécifiques pour les victimes (83% n’ont jamais été reconnues, ni protégées, Moins d’une victime sur 10 a pu bénéficier d’un suivi médical juste après les faits. Pour une majorité, il aura fallu plus d’une dizaine d’années) ;
  • la gravité des conséquences psychotraumatiques tout au long de la vie, avec de lourdes conséquences sur leur santé mentale et physique : 70% de dépressions, et de troubles anxieux, près de 50% de tentatives de suicides, 50% de troubles alimentaires, 36% de conduites addictives (MTV/Ipsos, 2019), 70% subissent à nouveaux des violences et 50% traversantes période précarité (IVSEA, 2016) ;
  • la fréquence des amnésies traumatiques (pour 40% des victimes de violences sexuelles dans l’enfance et jusqu’à 54% pour les victimes âgées de moins de 10 ans) MTV/Ipsos, 2019) ;
  • et une impunité quasi totale, moins de 1% des viols étant jugés en tant que tels (Infostat Justice 2018) ;


Toutes ces données rendent la prescription particulièrement injuste et rendent son abrogation nécessaire. D’AUTANT PLUS QUE
que le Conseil de l’Europe demande dans sa résolution 2330 du 24 juin 2020 la suppression de la prescription pour les violences sexuelles faiteaux enfants, que 18 pays européens l’ont déjà adoptée 90% des Françaises sont favorables pour les crimes sexuels sur les mineurs et les personnes vulnérables et 87% pour l'ensemble des crimes sexuels (MTV/Ipsos 2022).


Pour de nombreuses victimes la prescription leur interdit de poursuivre en justice leurs agresseurs alors bien même qu’elles ont été dans l’impossibilité ou l’incapacité de dénoncer à temps les viols et les agressions sexuelles qu’elles ont subis :

  • du fait de leur état de grande immaturité, vulnérabilité et dépendance,
  • de par les graves psychotraumatismes qui en sont la conséquences qui ne sont qu’exceptionnellement identifiés et pris en charge spécifiquement,
  • en raison des menaces et de la manipulation des agresseurs et de leurs complices avec lesquels elles sont fréquemment obligés de rester en contact puisqu’ils sont des proches et appartiennent majoritairement à leur famille,
  • à cause d’une société qui non seulement n’a pas été capables de les protéger, mais qui, gangrénée qu’elle est par le déni, la culture du viol, la loi du silence et l’absence de reconnaissance et de prise en charge des conséquences psychotraumatiques des violences, ne leur a pas permis d’identifier ce qu’elles avaient subi, ni de se sentir légitime pour le dénoncer.

Il faut beaucoup de temps aux victimes avant de prendre conscience ce qui leur est arrivé, de retrouver la mémoire, de ne plus être écrasées par la peur, la culpabilité et la honte, de ne plus être terrassées par le traumatisme, et de pouvoir avoir la force de parler et de porter plainte. Pour d'innombrables victimes, quand elles sont enfin en état de le faire, il est trop tard, la prescription les en empêche.

Si la loi a tenu compte de cette difficulté pour les mineurs victimes sexuelles en des délais spécifiques démarrant à la majorité, cela reste insuffisant et c’est la notion même de prescription qui doit être remise en cause et abrogée. En effet pour les mineurs la prescription a été portée à 30 ans après la majorité pour les crimes sexuels (depuis la loi Schiappa du 3 août 2018), à 20 ans après la majorité pour les délits sexuels aggravés (depuis la loi Perben du 9 mars 2004) et à 10 ans après la majorité pour les autres délits sexuels (la prescription étant pour les personnes ayant subi des violences sexuelles en tant qu’adulte de 20 ans pour les crimes sexuels et de 6 ans pour les délits sexuels). Il est à noter que les allongements des délais de prescriptions successifs ne sont et ne sont pas rétroactifs, ils continuent et continueront de laisser de nombreuses victimes sans possibilité de faire valoir leurs droits au pénal.

Il est donc particulièrement cruel et inhumain qu’un État comme le nôtre retire sous prétexte d’un délai qui n’aurait pas été respecté par les victimes, un droit fondamental aux victimes de crimes et délits considérés par le droit national, européen et international comme très graves assimilables à des tortures que les États sont dans l’obligation de prévenir et de punir, et étant connus comme ayant de très lourdes conséquences sur leur santé et sur leur vie à long terme et représentant un problème majeur de santé publique, alors bien même que notre État échoue :

  • à prévenir ces violences qui sont de très grandes ampleurs, à mettre en place des lois adaptées pour protéger tous les enfants de ces violences ;
  • à identifier les victimes, à dépister les signes alarmants et les symptômes de souffrance, et à entendre les victimes ou les personnes qui veulent les protéger quand elles parlent et dénoncent les violences ;
  • à secourir, protéger les victimes, les prendre en charge, leur assurer une aide et un accompagnement adapté exempt de toute maltraitance, à leur fournir les soins indispensables à la préservation de leur santé, à réparer les très importants préjudices qu’elles ont subi qui portent atteinte à leur santé, et sont un facteur de grande précarité, d’aggravation des inégalités, des discriminations qu’elles subissent et de leurs vulnérabilités et de leurs handicap ;
  • à qualifier les violences quand elles sont connues ou dénoncées, à identifier et à poursuivre les agresseurs, à les juger, à les condamner et à prévenir la réitération de violences sur la même victime et sur de nombreuses autres victimes.
  • à donner aux victimes des réparations à hauteur des préjudices subis qui leur permettent de se reconstruire dans les meilleurs conditions.

Cela revient à retirer aux victimes un droit fondamental pour qu’elles puissent être protégées et réparées en leur signifiant que c’est de leur faute puisqu’elles n’ont pas dénoncé aux autorités les violences à temps, et donc de les sanctionner alors que leurs droits ont été totalement bafoués et que rien n’a été fait pour les secourir, les protéger, ni les aider. De plus dans de nombreuses affaires de pédocriminalité, certaines victimes peuvent avoir subi les mêmes violences par un même agresseur, dans des conditions similaires avec les mêmes preuves, sur des dizaines d’années. Ainsi dans l’affaire du chirurgien Le Scouarnec où ont été dénombrées plus de 400 enfants victimes sur 30 ans, ou comme dans celle de « l’électricien » ou plus de 70 enfants victimes. Du fait de la prescription certaines ne pourront pas aller en justice alors que pour d’autres cela sera possible, sans que rien, absolument rien ne puisse justifier que tous les crimes commis par un même agresseur ne soient pas jugés. Nous estimons que les arguments habituels sur lesquels se fondent la prescription comme le droit à l’oubli ou bien la déperdition de preuves n’ont aucune légitimité. La prescription est une atteinte à l’égalité des droits face à la justice.

Cette situation est profondément inhumaine, il ne suffit pas d’allonger les délais, la prescription doit être abrogée : nous demandons une imprescriptibilité des crimes sexuels et des délits sexuels aggravés, et une interruption de la prescription dans les cas suivants :

  • pour les crimes et délits sexuels aggravés commis sur des mineurs en cas de commission par leur auteur d’un même crime ou d’un même délit sexuel aggravé contre d’autres mineurs (dès lors que ce même crime ou ce même délit sexuel aggravé contre d’autres mineurs est commis avant la prescription du premier) ;
  • lors d'une amnésie traumatique ou de troubles psychotraumatiques dont une expertise ordonnée par un magistrat aura apprécié si elle/ils constituent un obstacle de fait insurmontable rendant impossible la mise en mouvement ou l'exercice de l'action publique, en application de l'article 9-3.

Pouvons-nous continuer à vivre dans un monde où les victimes de crimes sexuels sont abandonnées et où les violeurs restent impunis ? Est-cela l’ordre public que défend la prescription ?

Texte de Muriel Salmona, pour la campagne STOP PRESCRIPTION de novembre 2020 réactualisé en novembre 2023

Cette campagne STOP PRESCRIPTION a été lancée par Sarah Abitbol (patineuse professionnelle, autrice), Nadège Beausson-Diagne (actrice, autrice, réalisatrice), Andréa Bescond (comédienne, scénariste, réalisatrice, autrice), Arnaud Gallais cofondateur du collectif Prévenir et protéger, Mie Kohiyama présidente de Moiaussiamnésie, Marie Rabatel présidente de l’AFFA (Association Francophone de Femmes Autistes), Dre Muriel Salmona, présidente de Mémoire Traumatique et Victimologie, et nous ont rejoint Vanessa Aiffe Ceccaldi (actrice), Philippe Bizot, Adélaïde Bon (comédienne, autrice), Sandrine Martins (militante féministe contre les violences sexuelles). Les vidéos ont été réalisées par Guy Beauché. Nous remercions très chaleureusement celles et ceux qui ont témoigné.

Les vidéos de la campagne STOP PRESCRIPTION sont visibles sur la chaîne YouTube #StopPrescription où elles ont déjà été vues des dizaines de milliers de fois : https://www.youtube.com/channel/UCWTJdzjfTVAQmOQ2d-B6PLw/videos.

POUR EN SAVOIR PLUS :

Les sites des associations qui ont lancé cette campagne STOP PRESCRIPTION : Association Francophones de Femmes Autistes AFFA : < https://femmesautistesfrancophones.com> Association Mémoire Traumatique et Victimologie : https://www.memoiretraumatique.org Association Moiaussiamnesie : https://moiaussiamnesie.fr

Les vidéos de la campagne STOP PRESCRIPTION réalisées par Guy Beauché sont visibles sur la chaîne YouTube #StopPrescription : https://www.youtube.com/channel/UCWTJdzjfTVAQmOQ2d-B6PLw/videos

Des ouvrages à lire et des œuvres à voir de ayant participé aux vidéos qui témoignent de violences sexuelles subies dans l’enfance, de leurs conséquences et de l’amnésie traumatique :
Abitbol Sarah, Un si long silence, éd. Plon, 2020.
Bescond Andréa, Les chatouilles, pièce de théâtre et film, livres Et si on se parlait ?.
Bon Adélaïde, La petite fille sur la banquise, éd. Poche, 2019.
Cécile B. Le petit vélo blanc, éd Calmann-Lévy, 2015 l’auteure est Mie Kohiyama.
Salmona Muriel, Le livre noir des violences sexuelles, 3e éd. Dunod, 2022.

Des articles de la Dre Muriel Salmona qui présentent l’état des lieux des violences sexuelles faites aux enfants, leur impunité, leurs conséquences psychotraumatiques dont l’amnésie traumatique :
- Le psychotraumatisme du viol : Conférence introductive pour la 2ème journée du 1er Congrès de la chaire internationale Mukwege, Le 14 novembre 2019.
- L’amnésie traumatique : un mécanisme dissociatif pour survivre 2018.

Trois témoignages à lire du Manifeste pour l’imprescriptibilité des crimes sexuels

Le témoignage de Corinne : http://stopauxviolences.blogspot.fr/2016/11/temoignage-de-corine-dans-le-cadre-du.html.

La lettre de Laurent Esnault réalisateur du documentaire École en bateau, enfance sabordée: http://stopauxviolences.blogspot.fr/2017/01/lettre-de-laurent-esnault-realisateur.html.

La lettre d'une victime de viol incestueux de 14 à 20 ans et qui n'a pas pu porte plainte à cause de la prescription : http://stopauxviolences.blogspot.fr/2017/01/lettre-dune-victime-de-viol-de-lage-de.html.

Les pétitions et manifestes de l’association Mémoire Traumatique et Victimologie :

Pétition pour l’imprescriptibilité des crimes sexuels(plus de  75 600 500 signataires et 27 assos co-signataires) à signer ICI
Manifeste pour l’imprescriptibilité des crimes sexuels.
Pétition Stop impunité des crimes sexuels (près de 109 000 signataires et 29 assos co-signataires) à signer ICI.
Manifeste contre l’impunité et ses 8 mesures

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dimanche 17 septembre 2023

Nouvelles versions disponibles en anglais et en portugais du livret de prévention et d'information sur les violences et leurs conséquences "Quand on te fait du mal"




Nouvelles version en anglais et en portugais du livret de prévention et d'information 
"Quand on te fait du mal" 

co-écrit par Muriel Salmona et Sokhna Fall, adapté et illustré par Claude Ponti 
à destination des maternelles et des primaires

Livrets téléchargeables gratuitement sur notre site memoiretraumatique.org



version anglaise ICI




version portugaise ICI





Il est possible de se procurer gratuitement le livret imprimé en nous contactant par mail à memoiretrumatique@gmail.com

Pour accompagner le livret nous avons le plaisir de vous proposer :


Notre guide d’information du livret  qui donne de nombreuses informations sur les violences faites aux enfants et leurs conséquences psychotraumatiques, sur les mécanismes de sidération, dissociation, mémoire traumatique et les stratégies de survie, ainsi que sur les conduites à tenir et la prise en charge des enfants victimes, il est consultable téléchargeable en PDF sur le site : https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Documents-pdf/Guide-d-accompagnement-livret-Quand-on-te-fait-du-mal.pdf

Notre fiche pratique d’utilisation du livret page à page, où vous trouverez des conseils pratiques pour utiliser le livret et pour réagir face à des révélations, elle est consultable et téléchargeable en PDF sur le site : https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Documents-pdf/fiche-page-a-page-pour-Quand-on-te-fait-du-mal.pdf 

Le retour d’expériences et de conseils d’utilisation du livret  d’une pédopsychiatre à Bordeaux la Dre Fleur Caix qui travaille en institution de soin pour enfants (hôpital de jour et DITEP) il est consultable et téléchargeable en PDF sur le site: https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Documents-pdf/livret-commentaire-de-Fleur-Caix.pdf


D’autres brochures (pour collégiens, lycéens et étudiants et adultes) sont téléchargeables sur la page : https://www.memoiretraumatique.org/publications-et-outils/brochures-d’information.html

Ainsi que des modules de formation interactive gratuite en ligne sur comment protéger les enfants victimes de violences sexuelles et comment protéger les personnes en situation de handicap des violences sexuelles, ces modules ont été labellisés par le gouvernement français :













jeudi 8 juin 2023

Pétition de la campagne Stop au Déni 2023 pour une culture de la protection et du soin :

CAMPAGNE STOP AU DÉNI 2023

STOP À LA MISE EN DANGER DES VICTIMES DE VIOLENCES INTRA-FAMILIALES ET SEXUELLES :  

Pour une culture de la protection et du soin

Et ses 15 mesures urgentes à mettre en place 


PÉTITION DE SOUTIEN À SIGNER ET PARTAGER



IL EST TEMPS D'AGIR POUR EXIGER


  • une culture de la Protection et du Soin
  • une reconnaissance du psychotrauma
  • et la fin du déni et de l'Impunité pour toutes ces violences

Les violences sexistes et sexuelles sont un problème de sécurité et de santé publique majeur, l’absence de protection, de soins et l’impunité représentent pour les victimes de graves mises en danger et pertes de chance pour leur santé, elles sont une atteinte intolérable à leurs droits. La France a des obligations internationales vis à vis de ces graves violations des droits humains : celles de protéger, de prendre en charge et de réparer les victimes, de poursuivre, de condamner les agresseurs et d’empêcher toute réitération de ces violences.








Pour une culture de la protection et du soin






Et pour lutter contre l’impunité : 

Les femmes et les enfants subissent massivement ces graves violations des droits humains que sont ces crimes et délits sexistes et sexuels : 1 femme est tuée par son (ex)conjoint tous les 2 jours et demi ; 1 enfant est tué par un de ses parents tous les 5 jours, 1 femme sur 3 subit des violences conjugales et/ou sexuelles dans sa vie (chaque année 220 000 sont victimes de violences conjugales  et 94 000 de viols), 1 fille sur 5 et 1 garçon sur 13 des violences sexuelles (chaque année plus plus de 160 000 enfants en sont victimes dont plus de 80% sont des filles). 


Dans 9 cas sur 10 les auteurs des violences sexuelles sont des hommes et des prochesen très grande majorité (famille, conjoints, institutions,…). Les femmes et les enfants les plus vulnérables sont bien plus à risque d’en subir ; les femmes en situation de handicap en subissent 2 fois plus, les enfants en situation de handicap trois fois plus, et jusqu’à cinq à 6 fois plus quand le handicap est mental, psychique ou neuro-développemental : 9 femmes autistes sur 10 ont des violences sexuelles en majorité dès leur enfance (OMS, 2017, Dammeyer, 2018, Drees, 2020, Cazalis,2022).


La très grande majorité des victimes de ces violences ne sont pas reconnues ni secourues, elles sont condamnées à survivre seules aux violences et à leurs conséquences psychotraumatiques sans protection, sans justice, sans aide ni soins ni réparations. Seules 10% des victimes de viols ont eu des soins d’urgence et seules 8,5% des victimes de violences sexuelles dans l’enfance ont bénéficié de soins spécialisés en psychotrauma. Les victimes mettent de 10 à 13 ans pour trouver un professionnels


L’absence de repérage, de protection, de reconnaissance du psychotraumatisme et de soins spécifiques, la faillite du traitement des plaintes et des signalements (plus de 74% de classements sans suite pour les plaintes pour viols) et l’impunité quasi totale dont bénéficient les agresseurs représentent de graves mises en danger et pertes de chance pour les victimes. C’est intolérable.


Sans protection, ni soin ces violences sont d’autant plus répétées et traumatisantes. La vie et la santé mentale et physique des victimes sont durablement mises en danger avec de lourdes répercussions sur leur vie personnelle, amoureuse et sexuelle, leur scolarité et leur vie professionnelle. Cela aggrave les situations d'inégalités, de discriminations et de handicap, augmentent les risques de précarité, de vulnérabilité et de subir de nouvelles violences (continuum de violences).


Les très lourdes conséquences psychotraumatiques sur la santé des victimes à long terme sont d’autant plus sévères que les victimes sont des enfants et des personnes vulnérables. Elles sont dues à des mécanismes de sauvegarde mis en place par le cerveau lors des violences qui entraînent une dissociation traumatique qui anesthésie les émotions tant que la victime est confrontée à des situations de violences ou de stress, une mémoire traumatique qui fait revivre à l’identique les violences dès qu’un lien les rappelle, comme une torture sans fin et des stratégies de survie pour y survivre : conduites d’hypervigilance, d’évitements et de contrôle pour y échapper, et conduite à risques dissociantes pour l’anesthésier. 


Sans protection ni soins spécifiques précoces des troubles psychotraumatiques pour traiter leur mémoire traumatique, les victimes ont un risque de mort précoce par homicides, suicides, accidents, maladie liées au stress de subir de nouvelles violences, 1 sur 2 fait des tentatives de suicides et des dépressions à répétition, de troubles anxieux majeurs, de troubles du sommeil et de l’alimentation, de conduites addictives et de conduites à risque, de douleurs chroniques, de troubles cardio-vasculaires, gynéco-obstétriques, endocriniens, gastro-digestifs, locomoteurs, immunitaires, neurologiques, etc.


Or les études internationales ont démontré que des soins spécifiques du psychotrauma, accompagnés d’une protection, sont très efficaces ils permettent d’éviter la presque totalité de ces conséquences. Pourtant les professionnels de la santé ne sont toujours pas formés systématiquement et l’offre de soin spécifiques des traumas est très insuffisantes. Cette absence de reconnaissance et de prise en charge des traumas nuit gravement aux victimes, les symptômes psychotraumatiques font l’objet de diagnostics erronés et des soins inadaptés, quand ils ne sont pas retournés contre les victimes pour décrédibiliser leurs plaintes et alimenter les stéréotypes sexistes.


Aucune victime de violences sexistes et sexuelles ne doit être laissée sans secours, protection, aides, soins ni réparations. Dès les premières violences tous les agresseurs doivent être poursuivis, punis et être empêchés de réitérer des violences. Ce sont des obligations internationales auxquelles l’Etat français ne peut se soustraire.


Le premier facteur de risque de commettre des violences est d’en avoir déjà subi dans l’enfance, ce risque est en grande partie lié à des conduites dissociantes violentes qui sont des conséquences psychotraumatiques, il pourrait être évité si tous les enfants victimes de violences étaient protégés et soignés.


Campagne Stop au Déni de l'association Mémoire Traumatique et Victimologie https://www.memoiretraumatique.org

C’est pourquoi nous réclamons de la part de l'état une volonté politique forte pour instaurer une culture de la protection, du trauma, du soin et de la réparation pour les victimes de violences sexuelles. Pour cela, nous exigeons la mise place en urgence de 15 mesures indispensables pour améliorer les soins des femmes et des enfants victimes de violences sexistes et sexuelles, ces soins s’inscrivant dans une prise en charge holistique médico-psychologique, sociale et judiciaire (cf Manifeste contre l’impunité

Pour consulter l’ensemble des 15 mesures :

:

1 en formant TOUS les professionnels de la santé dès leurs études et en formation continue  à la psychotraumatologie et la victimologie ainsi qu’à l’accueil, la protection et la prise en charge d’une victime quel que soit son âge, son lieu de vie (famille, foyers, institutions, lieux de détention), ses handicaps, son état de santé, sa vulnérabilité ; la psychotraumatologie et la victimologie, doivent être des matières obligatoires et devenir une spécialisation à part entière en médecine ;

2 en développant une information de qualité (campagnes, sites, brochures…) destinée aux enfants, aux parents et au grand public sur les violences, leur prévention et leur dépistage, les conséquences médicales des violences sur la santé mentale et physique, les symptômes psychotraumatiques et leurs mécanismes et les soins spécialisés, les conduites à tenir en urgence, les mesures de protection, les ressources et les soins spécialisés disponibles ;

3 en mettant en place un dépistage universel et systématique lors des consultations et des actes de prévention de tous leurs patients, et dans le cadre de la médecine scolaire, préventive et du travail, dépistage adapté à tous les enfants et les adultes en prenant en compte leurs handicaps et leurs difficultés de communication ainsi qu’une évaluation systématique du danger et du trauma (échelles) et du besoin de protection et soins des victimes de violences ;

4 en mettant en place une obligation de signalement des violences faites aux enfants et aux personnes vulnérables pour tous les professionnels sans exception y compris les médecins et en protégeant de façon effective de toute poursuite ordinale tous les professionnels de la santé qui signalent des violences sur mineurs ou sur personnes vulnérables et qui établissent des certificats pour leurs patients victimes de violences dans le cadre de procédures judiciaires pénales ou civiles (seul.e.s les procureur.e.s devraient pouvoir poursuivre les médecins en cas de soupçons de certificats mensongers, il n’est pas admissible que les professionnels soient poursuivis en juridiction ordinale sur des questions de forme du certificat) ;

5 en mettant en place une ligne téléphonique et une plateforme internet d’expertise pour les professionnels de santé pour les aider, les conseiller dans les situations complexes (dans notre enquête plus de 95% des médecins ayant suivi une formation sur les violences sexistes et sexuelles et leurs conséquences psychotraumatiques en 2009 ont plébiscité cette ligne ) ;

6 en créant des référents médecins, sage-femmes, infirmiers, psychologues formés spécifiquement dans toutes les structures hospitalières, les centres de santé, les institutions (dont l’institution scolaire) : il est essentiel de former tous les médecins, infirmier.e.s et psychologues scolaires et de s'assurer qu’ils soient en nombre suffisant et qu’ils bénéficient également de moyens suffisants pour faire leur travail de prévention et de dépistage  ;

7 en créant des centres de crises et de prise en charge des violences sexuelles accessibles 24h/24 et 7jours/7 dans les services d’urgence des hôpitaux pour adultes et pour enfants et les Unités Médico-Judiciaires où les victimes pourront bénéficier de soins et d'un recueil de preuves médico-légales, et où elles pourront porter plainte si elles le souhaitent, sur le modèle des 4 centres CPVS (et bientôt 6) existants en Belgique depuis 2017 ;

8 en créant adossés ou en lien avec ces centres de crise, des centres pluridisciplinaires de prises en charge des victimes de violences sexuelles (holistique : avec une prise en charge médicale, psychologique, sociale et juridique) pour toutes les victimes quel que soit leur âge, leur handicap, leur lieu de vie et le type de trauma, des soins spécialisés accessibles dans tout le territoire français et d’outre-mer, dans chaque territoire de santé mentale, sans frais avec des professionnels formés, qui travailleront en réseau et participeront à des actions de recherches (la convention d’Istanbul en exige 1 centre de prise en charge de victimes de violences sexuelles par bassin de 200 000 habitants ce qui, en France et en outremer ferait plus de 330 centres, on en est très loin) ;

9 en remboursant les prises en charge spécialisées par des psychologues cliniciens formés pour les victimes de violences sexuelles (avec des actes correctement rétribués) ;

10 en développant, en améliorant et en sécurisant l’offre de soin par des médecins (pédo-psychiatres et psychiatres) et des psychologues spécialisés, formés et en nombre suffisants, avec une prise en charge de la Sécurité Sociale à 100% (prévue par le code de sécurité sociale pour les victimes mineures mais dont les victimes bénéficient rarement, qu’il faudrait élargir aux victimes majeures et inscrire le psychotraumatismes dans le cadre des ALD) avec des actes valorisés en fonction de prises en charge complexes et nécessitant un travail en réseaules médecins conseils de CNAM, de la MDPH et les médecins du travail doivent être formés spécifiquement aux conséquences des violences sexuelles sur la santé et aux psychotraumatismes pour sécuriser les demandes d’arrêt de travail, les congés longue maladie et longue durée, les demandes d’invalidité et d’allocation adulte handicapé ; (ALD, prévue par le code de santé publique pour les victimes mineures mais qu’il faudrait élargie aux victimes majeures), d’allocations adultes handicapés (MDPH), de congés longues maladies et longues durée ;

11 en faisant parallèlement un plan Marshall pour la pédo-psychiatrie, la psychiatrie et la médecine préventive particulièrement la médecine scolaire  : augmenter le nombre de pédo-psychiatres, de psychiatres, développer le nombre de structures de soins pluridisciplinaires de proximité ;

12 en s’assurant du respect impératif des droits, de la volonté et du consentement des personnes victimes de violences sexistes et sexuelles tout au long de leurs parcours de soin, les patient.e.s doivent être protégées impérativement de comportements sexistes ou discriminatoires et de violences sexuelles de la part des professionnels du soin, les patient.e.s doivent être informé.e.s de leurs droits et des ressources à leurs disposition pour dénoncer des atteintes à leurs droits et des violences subies dans le cadre du soin, une culture de la bientraitance doit être mise en place  et hôpitaux psychiatriques, les institutions et tous les centres de privations de liberté ne doivent plus être des zones de non-droits (arrêt des contention, des mises en chambre d’isolement, protection des patients contre toutes les formes de violences, particulièrement sexuelles) ;

13 en formant spécifiquement et façon obligatoire les médecins experts auprès des tribunaux aux conséquences des violences sexuelles sur la santé et aux psychotraumatismes afin d’améliorer la qualité des expertises lors de procédures judiciaires pénales et civile (CIIVISE) il est scandaleux que les psychotraumatismes et la gravité des conséquences à long terme sur la santé et la vie des victimes soient si peu prises en compte et donne lieu à des expertises qui ne s'y réfèrent pas et à des réparations qui ne couvrent pas l’ensemble des  préjudices ;

14 en favorisant et en soutenant financièrement la création de lieux auto-gérés de rencontres, d’informations et d’échanges (groupes de paroles), d’activités de loisir et ou professionnelles (libres, sécurisées et à temps partiel) et de repos dédiés aux victimes de violences sexuelles avec l’aide de professionnel.le.s, ces lieux pouvant être adossés aux centres de soins ;

15 en développant la prise en charge spécialisée des agresseurs le plus tôt possible dès les premières conduites violentes et en traitant leurs traumatismes : de 25 à 30% des violences sexuelles sont commises par des mineurs, la plupart des agresseurs ont déjà subi des violences le plus souvent dans l’enfance : on sait (grande enquête de l’ONU de Fulu, 2017) que pour les hommes avoir subi dans l’enfance des violences physiques et sexuelles multiples par 14 le risque de commettre des violences sexistes et sexuelles à l’âge adulte (les femmes qui ont subi des violences physiques et sexuelles dans l’enfance ont 1 fois plus de risque de subir des violences conjugales et sexuelles à l’âge adulte). En l’absence de protection et de soins, les conduites risque dissociantes dont font partie les violences envers soi ou autrui sont une des stratégies de survie mises en place pour anesthésier sa mémoire traumatique (symptôme psychotraumatique qui fait revivre à l’identique les violences subies dans l’enfance puis celles commises par la suite : exercer des violences entraîne des conséquences psychotraumatiques chez l’agresseur qui vont renforcer les conduites dissociantes et alimenter les passages à l’acte). Si on est jamais responsable des violences que l’on a subi, ni de leurs conséquences psychotraumatiques, on est responsable du choix des stratégies de survie qu’on met en place quand elles portent atteinte à l’intégrité d’autrui. Protéger et soigner les traumas de tous les enfants victimes de violences permet d’enrayer le cycle des violences.

 CF les 15 mesures à mettre en place en urgence pour le soin et le Manifeste contre l’impunité et ses 8 mesures


Dre Muriel SALMONA, psychiatre, présidente de l’Association Mémoire Traumatique et Victimologie, auteure de Le livre noir des violences sexuelles (Dunod 3ème éd. 2022) et de Violences sexuelles. Les 40 questions-réponses incontournables (Dunod, 2ème éd. 2021); membre du comité scientifique de la chaire internationale sur « La violence faite aux femmes et aux filles dans les conflits » dite Chaire Mukwege et de la Commission indépendante inceste et violences sexuelles faites aux enfants, CIIVISE

Pour en savoir plus des articles à lire avec Biblio :

Prise en charge des conséquences des violences sexuelles subies dans l’enfance sur la santé des victimes, un impératif humain et une urgence de santé publique :15 mesures à mettre en place en urgence (2022) https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/2022Prise-en-charge-consequences-violences-sexuelles-urgence.pdf

SOIGNER LES VICTIMES DE VIOLENCES SEXUELLES  Un impératif humain et de santé publique, (2021) : https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/202112-Les-soins-aux-victimes-de-violences-sexuelles.pdf

LES VIOLENCES SEXUELLES : un psychotraumatisme majeur qu’il est essentiel de prendre en compte pour rendre justice aux victimes, les secourir, les protéger et les soigner (2021) : https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/2021_violences_sexuelles_un_psychotraumatisme_majeur.pdf

La fiche Comment venir en aide secourir protéger une victime de violences intra familiales, conjugales, institutionnelles et/ou sexuelles (2020) https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/2020-comment-secourir-victime-de-violences.pdf


FÉMINICIDES PAR (EX) CONJOINT OU (EX) PARTENAIRE INTIME : DES QUESTIONS INDISPENSABLES À POSER POUR ÉVALUER LE DANGER (2019) : https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Documents-pdf/2019-Fiche_evaluation_danger_feminicide.pdf

Comprendre et prendre en charge
l’impact psychotraumatique des violences conjugales pour mieux 
protéger les femmes et les enfants qui en sont victimes (2017) : https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/2017_Muriel_Salmona_Violences_conjugales_le_droit_d_etre_protegee_DUNOD.pdf

Les traumas des enfants victimes de violences : un problème de santé publique majeur (2018) : https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/2019-Rhizome-Les_traumas_des_enfants_victimes_de_violences.pdf

La lettre de l’observatoire national des violences faites aux femmes de 2021: les violences au sein du couple et les violences sexuelles en 2020 en France : indicateurs nationauxhttps://arretonslesviolences.gouv.fr/sites/default/files/2021-12/Lettre%20n°17%20-%20Les%20violences%20au%20sein%20du%20couple%20et%20les%20violences%20sexuelles%20en%202020.pdff

Le site stop-violences-femmes.gouv.fr Arrêtons-les avec des ressources, des outils et des kits pour les victimes, leurs proches et les professionnels ainsi que des clips pédagogiques d’expertes  : https://arretonslesviolences.gouv.fr/je-suis-professionnel/les-paroles-d-expertes