lundi 14 décembre 2020

Rapport Alexandra Louis sur la loi Schiappa Une déception de plus, une déception de trop ! article de la Dre Muriel Salmona, 6 décembre 2020


Rapport Alexandra Louis sur la loi Schiappa Une déception de plus, une déception de trop !



Dre Muriel Salmona, psychiatre, présidente de l’association Mémoire Traumatique et Victimologie, 6 décembre 2020


Le rapport d’évaluation de la loi Schiappa renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes du 3 août 2018 pour lequel Alexandra Louis a été missionnée au début de cette année vient d’être remis le 4 décembre 2020 au gouvernement. Nous espérions qu’il allait acter les failles importantes de cette loi concernant la lutte contre les violences sexuelles faites aux enfants (article 1 et 2), failles que nous n’avons jamais arrêté de dénoncer et de documenter


Nombre d’entre nous (professionnel.les, expert.es, responsables d’association, militant.es, victimes) ont été auparavant auditionné·es malgré la pandémie et les confinements, devant l’échec manifeste de cette loi, nous attendions de nouvelles propositions fortes pour y remédier. Pour cela nous avions fait un énorme travail de constats et de bilans, d’expertises, d’enquêtes d’études et de plaidoyers, nous avions transmis nos revendications portées par de très nombreuses associations, par les centaines de milliers de personnes qui ont signé des pétitions et soutenu des manifestes. 


Tout ça pour ça !… Quelle déception ! Que trouvons-nous dans le rapport d’Alexandre Louis  : en premier lieu elle insiste surtout sur le bilan positif de la loi, lui décernant un certificat d’auto-satisfecit, sans faire le bilan des décisions judiciaires concernant les violences sexuelles sur mineurs ce qui permet une absence criante de constat sur l’ampleur de l’échec du fameux article 2 de la loi qui n’a pas mis en place la mesure phare promise sur le seuil d’âge du non-consentement à 15 ans. 

Il y a certes des préconisations qui vont dans le bon sens telles que : 

  • La création de crimes et délits autonomes pour les moins de 15 ans mais distincts du viol et des agressions sexuelles sans seuil d’âge du non-consentement et tout en maintenant le délit d’atteinte sexuelle pour les 15-18 ans dont nous voulions l’abrogation. 
  • Un mécanisme de prescription glissante en cas de crimes en série, mais un refus d’introduire l’amnésie traumatique ans la loi comme obstacle insurmontable permettant la suspension du délai de prescription ( article 9-3 du CPP), Alexandra Louis préconise juste de supprimer la référence à la force majeure (qui nécessite une intervention extérieur) pour caractériser un obstacle insurmontable ce qui pourrait rendre possible que les juges puissent interpréter l’amnésie traumatique comme un obstacle majeur.
  • Ainsi qu’une nouvelle définition du délit d’exhibition sexuelle pour viser non pas la nudité mais bien plus l’obscénité et la commission d’actes ou gestes sexuels en public.
  • Et une refondre du délit de corruption de mineur pour réprimer notamment l’auto-pénétration imposée par autrui à distance et ce, avec un niveau délictuel de répression maximal.


Ces préconisations représentent quelques avancées mais sans réelle envergure, elles contournent comme nous le verrons les failles juridiques sur le seuil d’âge du non-consentement ou la prescription sans y remédier. L’imprescriptibilité des crimes sexuels sur mineurs est balayée, de même l’inscription dans la loi de l’amnésie traumatique comme obstacle insurmontable pour suspendre le délai de prescription, avec toujours les mêmes arguments d’autorité assénés qui ont pourtant déjà été maintes fois démontés. Le scandale du nombre effarants classements sans suite et de déqualifications des plaintes pour viols est ignoré. Et enfin nous notons une absence d’appel à une volonté politique forte pour mettre en urgence tous les moyens humains et financiers nécessaires. L’impasse est faite sur l’urgence de la situation pour lutter contre l’inconcevable impunité dont bénéficient les pédocriminels. 


Pourquoi un tel déni face à l’urgence de la situation ?


Comment rester aussi aveugle face à des faits et des chiffres aussi catastrophiques qui s’aggravent d’années en années concernant la pédocriminalité (pour rappel l’impunité est quasi totale moins de 1% des viols sur enfants sont jugés comme tels, alors qu’on estime que 130000 filles et 35 000 garçons sont victimes de viols et de tentatives de viols chaque année, et la France détient un triste record celui d’être le deuxième pays au monde à héberger le plus de sites pédocriminels et à avoir le plus de téléchargements de vidéos et de photos pédocriminelles, en sachant que chaque année le nombre de ces vidéos et photos, nous en sommes à plus de 70 millions en circulation sur le net) ? La dernière enquête de l’association Face à l’inceste menée par Ipsos de novembre 2020 fait état de plus de 6 millions de Français.es qui ont été victimes d’inceste. 


Combien de temps allons-nous continuer à tolérer de vivre entourés de pédocriminels qui ne sont jamais inquiétés et qui peuvent continuer à agresser des enfants de proche en proche, de génération en génération et de faire des dizaines voire des centaines de victimes ? Et combien de temps allons-nous continuer à tolérer à supporter que des générations d’enfants soient détruits et traumatisés, et deviennent des adultes aux vies brisées ?


À l’évidence le nombre effarant d'enfants victimes de violences sexuelles, les tortures, la dégradation la destruction et le traumatisme majeur qu’ils ont subis et qui vont transformer leur vie en un enfer et dégrader gravement leur santé à long terme, quand ils ne vont pas en mourir précocement, ne vous empêche pas de dormir ! 


Pourquoi rester dans le déni et ne pas faire le constat que nos lois ne sont pas adaptées aux enfants et que notre justice échoue à protéger les enfants victimes de violences sexuelles, à punir les auteurs et à empêcher la réitération de ces violences, ce qui met tous les enfants en danger : pour rappel ce sont au moins 1 fille sur 5 et 1 garçon sur 13 qui subissent des violences sexuelles (OMS 2014) et selon 1 enfant sur 5 selon le Conseil de l’Europe (2010). Et reconnaître enfin qu’il y a eu et qu’il y a toujours une volonté de ne pas prendre en compte la réalité de cette pédocriminalité et de s’y attaquer enfin avec les moyens nécessaires.


Pourquoi la lutte contre l’impunité de la pédocriminalité n’est-elle toujours pas une priorité politique ?


Alors que le 19 mai 2020, la commission des affaires sociales du Parlement européen a considéré que lutter contre la violence sexuelle à l’égard des enfants est une priorité politique. Elle exhorte les États membres à utiliser pleinement les ressources et à intensifier la coopération, et à développer et à améliorer les lois existantes pour protéger les enfants contre la violence sexuelle, afin de garantir que l’âge du consentement sexuel ne soit pas inférieur à 18 ans et à abolir le délai de prescription pour les violences sexuelles contre les enfants.


Face à cette exhortation, la France fait pâle figure, en 2020 nous sommes toujours un des très rares pays d’Europe à ne pas avoir inscrit dans la loi un seuil d’âge du non-consentement pour définir et qualifier les agressions sexuelles et les viols et l’imprescriptibilité est systématiquement rejetée. Pourquoi une telle complaisance des responsables politiques, des magistrats et juristes qui préfèrent protéger et défendre en priorité les droits des pédocriminels en imposant leurs arguments d’autorité de dominants, et en véhiculant une culture du viol et des stéréotypes sexistes éculés, plutôt que de protéger et défendre les droits des victimes, d’autant plus quand il s’agit d’enfants. Cette complicité omniprésente à tous les niveaux avec les pédocriminels et leurs discours mystificateurs est desespérante et monstrueuse.


Car pour arriver à cette situation d’impunité, il faut s’en donner du mal ! Il faut et ne pas avoir mis en place tout ce qui aurait permis d’améliorer depuis longtemps le dépistage des victimes, leur protection, leur prise en charge et de ce fait le nombre des plaintes et leur traitement judiciaire. Or cela fait plus de 20 ans que nous avons toutes les connaissances nécessaires pour agir, et 10 ans que toutes les instances internationales et européennes alertent sur la gravité de la situation et l’urgence d’agir avec des recommandations précises et contraignantes que la France s’est engagée à appliquer. Force est de constater une véritable intention politique à ne pas faire tout ce qu’il faut pour lutter efficacement contre cette pédocriminalité. Aux termes du droit international, l’Etat français pourrait être tenu responsable d’actes de violence sexuelle perpétrés par des particuliers s’il a manqué à son obligation d’empêcher ces actes ou de protéger les victimes par une conduite passive ou discriminatoire de manière constante, or c’est bien le cas.


Les enfants et les femmes ont bien peu de valeur dans ce sytème et leurs droits ne pèsent pas bien lourds face aux privilèges et aux rapports de force de dominants déterminés à exploiter leurs corps. Les enfants, les femmes devront encore attendre pour réellement être protégés des violences sexuelles, les prédateurs sexuels pourront continuer à violer et agresser sans risque, le déni et l’impunité ont de beaux jours devant eux… Et la propagande pédocriminelle peut continuer à minimiser et manier le déni en détournant les mots, en parlant d’abus sexuels (langage courant) ou d’atteintes sexuelles (langage juridique) quand il s’agit de violences sexuelles (d’agressions sexuelles et de viols) envers des enfants, de ne disserter que sur la contrainte ou la surprise et le risque d’atteinte à la présomption d’innocence.


Cela suffit de faire l’impasse sur la cruauté et la torture qui sont infligées à tous ces enfants victimes dont a utilisé le corps en les transformant en objet sexuel en les dégradant et en les privant de leur dignité. Il ne s’agit pas de sexualité, de pédophilie, d’abus sexuels, de contrainte et de surprise, il s’agit de violences sexuelles faisant parties des plus graves violation des droits humains, reconnus comme des actes cruels dégradants cruels et inhumain (droit européen) et des tortures (droit international). De violences qui sont exercées dans le cadre d’un rapport de force, de discriminations et d’exploitation avec des mises en scène de privilèges, d’inégalité de droits, de valeurs naturalisées comme étant normales et légitimes alors qu’elles sont construites dans le cadre d’une société patriarcale. Les enfants, les filles surtout, les femmes, et encore plus celles qui sont les plus vulnérables et discriminées du fait de handicap et de situation de grande précarité sont présentées dans ce système dominant comme ayant moins de valeur, moins de droits, pas de dignité pouvant être réduites à des objets sexuels, à des corps à exploiter, dégrader, piller avec le pire des sadisme.


Pourquoi une telle indifférence face à cette impunité et à ce que subissent tant d’enfants ?


À l’évidence le nombre effarant d'enfants victimes de violences sexuelles, les tortures, la dégradation la destruction et le traumatisme majeur qu’ils ont subis et qui vont transformer leur vie en un enfer et dégrader gravement leur santé à long terme, quand ils ne vont pas en mourir précocement, ne vous empêche pas de dormir ! 


De même, le risque important que tous les enfants, particulièrement les filles, d’autant plus quand ils sont en situation de grandes vulnérabilités et de discriminations (50% des violences sexuelles commises sur les mineurs le sont sur des enfants de moins de 10 ans, les enfants handicapés subissent de 3 fois plus de violences sexuelles et jusqu’à 6 fois s’ils ont des handicaps mentaux),du fait de l’impunité quasi totale dont bénéficient les pédocriminels, ne vous fait pas peur, et là aussi ne vous empêchent pas de dormir.


Bah moi si ! Je n’en dors pas ! Et nous sommes nombreux.ses à ne pas en dormir en tant que victimes de pédocriminalité et militant.es. À ce stade on ne peut même plus parler de déception !


Rappel sur la loi Schiappa 


Inscrite dans la grande cause nationale du quinquennat, avait suscité l’espoir de voir enfin corriger une faille majeure et scandaleuse de notre arsenal juridique concernant les viols et les agressions sexuelles commis sur des enfants par des adultes : l’absence d’un seuil d’âge du non-consentement permettant de considérer que toute pénétration sexuelle sur un enfant par un adulte est un viol et que tout contact sexuel est une agression sexuelle, avec son corollaire, la recherche malheureusement habituelle du consentement d’un enfant. 


Un seuil d‘âge de 15 ans avait été promis par le gouvernement et le Président de la République mais l’article 2 n’en a pas instauré, il a juste juste précisé que « pour un mineur de 15 ans la contrainte morale ou la surprise étaient caractérisés par l’abus de vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour consentir à ces actes sexuels » (phrase difficile à comprendre à la première lecture qui a permis Mme Schiappa de surfer allègrement sur le sens qu’on pourrait lui donner en invoquant l’existence désormais d’un seuil d’âge, un enfumage qui n’a trompé que les naïfs !), laissant aux magistrats la possibilité de continuer à rechercher le consentement d’un enfant et de qualifier les viols et les agressions sexuelles en délit d’atteinte sexuelle. La loi Schiappa, immédiatement applicable aux procédures judiciaires en cours, n’a donc pas empêché de nouveaux scandales semblables à ceux suscités en 2017 par Sarah et Justine, petites filles de 11 ans considérées comme consentantes à des viols par des adultes de 27 et 21 ans, scandales qui avaient été à l’origine de la loi. Et ce rapport vient d’être remis en plein nouveau scandale, celui de Julie violée de 13 à 15 ans par 20 pompiers, seuls 3 d’entre eux ont été mis en examens pour viols, viols finalement  déqualifiés en atteinte sexuelle après 10 ans de procédure.


Nous avions également eu l’espoir avec la loi Schiappa d’une abrogation ou tout au moins d’un allongement des délais de prescription pour les crimes sexuels et les délits sexuels aggravés, ainsi que d’une levée de prescription pour les crimes en série et en cas d’amnésie traumatique reconnue comme un obstacle majeur. Avec l’article 1 de la loi, l’imprescriptibilité a été rejetée et nous avons obtenu un allongement à 30 ans des délais de prescription après la majorité pour les crimes sexuels mais pas pour les délits sexuels aggravés. Quant aux levées de prescription en cas de crimes en série ou d’amnésie traumatique, alors qu’elles avaient été votées par le Sénat et elles ont mystérieusement disparu en Commission Mixte Paritaire et n’ont donc pas été votées. Espoir déçu là aussi… 


Devant la fronde de toutes celles et ceux qui dénonçait l’article 2, la loi étant immédiatement applicable Mme Schiappa avait promis une évaluation des décisions judiciaires au bout d’un an, il a fallu près de deux ans et demi pour l’avoir enfin, entre temps que s’est-il passé ?


La loi Schiappa n’a pas empêché de nouvelles décisions judiciaires scandaleuses scandales semblables à ceux suscités en 2017 par Sarah et Justine, petites filles de 11 ans considérées comme consentantes à des viols par des adultes de 27 et 21 ans, scandales qui avaient été à l’origine de la loi. Pendant ces deux années grâce à Mie Kohiyama présidente de l’association Moi Aussi Amnésie et Marie Rabatel présidente de l’Association Francophone des Femmes Autistes (AFFA) de nombreuses décisions judiciaires ont été recensé à partir de la presse : on y trouve toujours des plaintes pour viols et agressions sexuelles sur mineurs de moins de 15 ans déqualifiées en atteintes sexuelles ce que la loi Schiappa était censée éviter, des correctionnalisations de viols sur mineurs en agressions sexuelles qui sont légion, des condamnations avec sursis, nous y trouvons également des comparutions immédiates pour viols et ce qui est particulièrement choquant des comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) également pour viols alors que les crimes sont exclus de ce dispositif.

 

En 2018 Infostat Justice a publié les chiffres chocs sur le traitement judiciaire des violences sexuelles, et il y a avait déjà de quoi tirer la sonnette d’alarme et réagir pour les parlementaires (dont la députée Alexandra Louis) et pour le gouvernement, on n’a rien entendu. Pourtant ces chiffres étaient effarants : 74% des plaintes pour viols (plaintes de mineurs ou d’adultes) étaient classées sans suite, 50% des plaintes instruites étaient déqualifiées, et au total 10% seulement de ces plaintes étaient jugées pour viols. En prime on a eu le coup de grâce, l’information qu’en 10 ans les condamnations pour viol avaient diminué de 40% alors que selon les enquêtes de victimation de l’Insee/ONDRP, le nombre de viols ne fait qu’augmenter d’année en année.


Et en ce qui concerne la prescription, des affaires pédocriminelles récentes et en cours (comme celle de l’ex chirurgien Le Scouarnec) montrent la nécessité d’abroger les délais de prescription (l’imprescriptibilité des crimes sexuels sur mineurs existe déjà dans plusieurs pays d’Europe, Belgique, Royaume-Uni, Suisse) ou tout au moins d’instituer une levée de prescription dans le cas de crimes en série ou de situations d’amnésie traumatique. En effet Le Souarnec aurait violé ou agressé sexuellement plus de 300 enfants en 30 ans. Pour beaucoup de victimes les faits sont prescrits alors qu’elles ont subi les mêmes violences par le même agresseur, que nombreuses sont celles qui ont été totalement amnésiques parce qu’elles étaient sous anesthésie générale pendant les violences ou parce qu’elles étaient gravement traumatisées et ont développé une amnésie dissociative. Toutes ces victimes ont été répertoriées dans les carnets de Le Scouarnec, celui-ci ayant décrit précisément les actes qu’il avait commis sur eux. L’injustice de la prescription apparaît dans toute son ampleur : elle entraîne une grave inégalité de droits entre les victimes, une bonne partie ne pouvant obtenir justice. Là aussi nous attendions un constat implacable et des préconisations fortes, et ce n’est pas le cas.


Et en ce 4 décembre 2020 le rapport d’Alexandra Louis est remis en plein nouveau scandale, celui de Julie violée de 13 à 15 ans par 20 pompiers, dont seuls 3 d’entre eux avaient été mis en examens pour viols, viols finalementdéqualifiés en atteinte sexuelle après 10 ans de procédure.


Comment le rapport d’Alexandra Louis évalue-t-il les articles 1 et  2 ?


Le premier choc à la lecture de l’intégralité du rapport d’évaluation de la loi Schiappa est de constater qu’aucun chiffre n’y figure concernant les traitements des plaintes pour agressions sexuelles et viols sur mineurs de moins de 15 ans : nombre des classements sans suite, déqualifications, non-lieux, condamnations, aucun chiffre ni aucune analyse n’apparaît dans ce rapport malgré un recul de plus de 2 ans et le fait que nous lui ayons remis les nombreux exemples de procédures judiciaires prouvant que la loi Schiappa n’évitait pas l’a recherche de consentement des enfants de moins de 15 ans et les qualifications en atteintes sexuelles de pénétrations par des adultes. Son rapport qui met en avant des retours positifs des magistrats, concède que des voix s’élèvent contre l’article 2 et préconisent avec force la mise en place d’un seuil d’âge du non-consentement en dessous duquel toute pénétration commise par un adulte serait un viol et tout contact sexuel une agression sexuelle. 


La grande majorité demandent un seuil d’âge à 15 ans et en cas d’inceste, d’auteur en position d’autorité et de victime en situation de handicap et de grande vulnérabilité à 18 ans. et avec des situations spécifiques de seuil et d’écart d’âge quand l’auteur est lui même mineur. Cet ensemble permettrait l’abrogation du délit d’atteinte sexuelle, ce fourre-tout bien trop commode pour ne pas qualifier les viols et agressions sexuelles sur mineurs.


Une voix discordante est rapportée celle du Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les homme qui propose, et c’est incompréhensible, un seuil d’âge à 13 ans et une présomption simple de contrainte


Quelles préconisations Alexandra Louis propose-t-elle dans son rapport pour améliorer ce fameux article 2 ?


Elle rejette le seuil d’âge du non-consentement avec les mêmes arguments, que ceux assénés ad nauseam avant le vote de la loi Schiappa de risque d’anticonstitutionnalité et d’atteinte de la présomption d’innocence. 


Et nous propose une fois encore des aménagements, en conservant à nouveau l’écœurant délit d’atteinte sexuelle entre 15 et 18 ans, qui implique que des mineurs pourraient consentir à des contacts ou des pénétrations sexuelles avec des adultes ayant autorité ou dans une situation d’inceste ou de handicap, et pour les moins de 15 ans la création de délits et de crimes autonomes qui ne seraient pas nommés viols ou agressions sexuelles.


Dans ce pays qui se préoccupe si peu des victimes, qui tolère la pédocriminalité et ne se scandalise pas de son impunité, tout semble bon pour éviter à tous les niveaux de qualifier des faits d’agressions sexuelles et encore plus de viols par un adulte sur un mineur.


Si on peut parfaitement comprendre qu’une personne accusée de viol ou d’agression sexuelle sur un mineur de 15 ans puisse être présumée innocente des actes dénoncés : à savoir avoir utilisé les parties sexuelles du corps d’un enfant en les touchant ou en les pénétrant avec son sexe ses doigts ou un objet pour son seul plaisir et pour en jouir. Et qu’il est normal qu’il faille prouver que les faits se soient bien produits. Il est beaucoup plus incompréhensible alors que les faits ont été établis, d’être présumé innocent d’avoir commis des violences sexuelles telles que les agressions sexuelles et le viol en ayant utilisé la violence la contrainte la menace ou la surprise pour utiliser et pénétrer un enfant. Grâce à l’existence du délit qui implique qu’il peut y avoir un consentement d’un mineurs de moins de 15 ans à des contacts et des pénétrations sexuelles par un adulte.


Le délit d’atteinte sexuelle énonce que ces faits sont interdits mais que ce ne sont pas des violences sexuelles (ni des agressions sexuelles, ni des viols), que ce sont des actes sexuels que leur auteur a pu pensé comme consenti par l’enfant puisqu’il n’a pas eu à utiliser de violence, contrainte menace ou surprise, et c’est à l’enfant de prouver qu’il n’a pas consenti à ces actes, il doit donc prouver qu’il n’a pas consenti à être utilisé, réduit à un objet,  gravement atteint dans sa dignité et son intégrité, torturé. C’est d’une cruauté sans nom.


Tout se passe comme s’il était a priori particulièrement injuste et infamant d’accuser un coupable d’agressions sexuelles ou plus encore de viol, quant à le condamner, n’en parlons pas ! Nos législateurs, nos magistrats, nos policiers s’entendent à merveille pour éviter toute mise en examen des pédocriminels. Et quand ils sont mis en examen (ça arrive quand même parfois, dans 26% des plaintes pour les viols), ils font tout pour  éviter que les actes commis soient appelés par leur nom, et qualifiés comme des agressions sexuelles ou des viols ! Les viols sont déqualifiés à tour de bras en atteintes sexuelles ou en agressions sexuelles. Il est à leurs yeux bien plus grave de condamner un homme pour viol que de ne pas rendre justice à un enfant qui a été agressé ou violé. Tout cela fait courir un grand risque de réitérations sur la victime et sur d’autres enfants, mais ils s’en moquent, ce n’est pas si grave à leurs yeux, c’est normalisé sous couvert de difficultés à qualifier les violences sexuelles, à rassembler des preuves, avec l’arme absolue de la présomption d’innocence dont on se demande parfois si elle permet une seule mise en accusation pour quelque délit ou crime sexuel que ce soit.


Pour protéger les agresseurs les instruments juridiques abondent : prescription, définitions du viol et des agressions sexuelles totalement inadaptées pour les mineurs, absence de seuil d’âge du non-consentement, délit d’atteinte sexuelle, possibilité de déqualification et de correctionnalisation du viol…


Il est incroyable que la définition actuelle du viol permette encore de considérer que des contacts et des pénétrations sexuelles sur un enfant soient de la sexualité qui pourrait être consentie, que ce serait juste interdit pour un adulte sans être de la violence. C’est fou qu’il faille sans cesse répéter qu’il ne s’agit en aucun cas de sexualité mais de graves violations des droits humains commises sur des enfants qui ont des conséquences gravissimes à long terme.


On ose en toute indécence signifier à l’enfant qu’il aurait consenti à ces actes destructeurs, inhumains et dégradants, et que l’auteur de cette destruction n’aurait pas eu la conscience d’avoir été violent ou d’avoir usé de contrainte. C’est monstrueux, il n’y a pas d’autres mots.


Ces juges et ces législateurs croient-ils un seul instant que ces pauvres adultes innocents victime de leurs désirs ne se rendent pas compte de ce qu’il font, de leur cruauté et de leur violence, et que les enfants, particulièrement ces petites filles, ces « Lolitas » peuvent les pervertir, les séduire, les provoquer et les tromper en leur faisant croire qu’elles sont consentantes, bien sûr que non ! 


En fait, ceux qu’il veulent protéger d’urgence, ce sont ces adultes bernés par des enfants qui ne pensent qu’à être détruits et dégradés, c’est cela ? On ne va pas leur coller l’étiquette infamante de pédocriminel, ce serait vraiment trop méchant et trop injuste pour eux, alors qu’il ne pensent qu’à utiliser innocemment un privilège qu’ils ont sur le corps des enfants et plus particulièrement des filles et des femmes. A la rigueur ils veulent bien entendre qu’en raison d’un ordre moral rétrograde (dont on nous bassine avec le retour supposé), ce soit interdit, mais certainement pas qu’ils ont commis une des pires violences ! Être considérés comme des agresseurs sexuels, des violeurs, ah non ! c’est une atteinte à leur honneur de dominant, un lèse-majesté.


Et il y a un nombre incroyable de complices pour accourir à leur secours et leur dire «  mais non ne vous inquiétez pas, on va vous arranger cela, on ne va pas dire que vous êtes des agresseurs sexuels ou des violeurs, mais que vous êtes de gentils pédophiles qui aiment les enfants et sont attirés sexuellement par eux, et qui sont piégés par leurs pulsions et par les attitudes et les comportements des enfants, qu’on a d’ailleurs plein d’amis qui ont été accusés à tort ». On va tordre la réalité et la vérité, on va transformer ces agressions sexuelles et ces viols sur mineurs que vous avez commis en atteintes sexuelles pour la justice, et bien sûr en simple abus, en pédophilie pour le grand public.


Quel joli tour de passe-passe pour transformer en consentement la sidération et la dissociation traumatique des enfants que vous avez terrorisés 



Qu’en est-il dans le rapport d’Alexandra Louis de l’évaluation de l’article 1 concernant les délais de prescription ?



Pourquoi, en ce qui concerne la prescription, avoir balayé avec toujours les mêmes arguments éculés l’imprescriptibilité des crimes sexuels sur mineurs (en raison du dépérissement des preuves, d’une insécurité juridique  et de l’attachement de la France a réserver l’imprescriptibilité qu’aux crimes contre l’humanité) alors que de plus en plus de pays l’ont mise en place dont dernièrement la Belgique le 7 novembre 2019 (rejoignant en cela la Suisse, la Grande Bretagne et les Pays-Bas), et que le rapport de la mission de consensus  de Jacques Calmette et Flavie Flamant sur le délai de prescription des crimes sexuels commis sur les mineur.es de 2017 avait conclu de façon très argumentée que rien n’empêchait de rendre ces crimes imprescriptibles en France ? 


Le point positif du rapport c’est de préconiser la levée de prescription en cas de crimes sexuels en série d'un même prédateur avec la mise en place d’un mécanisme de « glissement de prescription » (pour rappel un amendement du gouvernement sur cette levée de prescription en cas de crimes en série avait été proposé en juin 2018 dans le cadre de la proposition de loi Schiappa et avait été voté par le Sénat, mais il avait disparu sans explication lors de la commission mixte paritaire, ce qui fait qu’il ne faisait plus partie de la loi lors de son vote définitif le 3 aout 2018 !). 


En revanche, a été écartée des préconisations du rapport d’Alexandra Louis la reconnaissance de l’amnésie traumatique comme obstacle insurmontable suspendant la prescription pour permettre à la victime d’exercer ses droits à déclencher une action publique en s’appuyant sur Art. 9-3. « Tout obstacle de droit, prévu par la loi, ou tout obstacle de fait insurmontable et assimilable à la force majeure, qui rend impossible la mise en mouvement ou l'exercice de l'action publique, suspend la prescription » (la loi n° 2017-242 du 27 février 2017 portant réforme de la prescription en matière pénale,). Le Sénat avait voté pourtant un amendement en ce sens en juin 2018 demandant que l’amnésie traumatique soit prise en compte comme obstacle insurmontable après expertise médicale, cet amendement voté a disparu lui aussi en commission mixte paritaire, et donc de la loi définitive. 


Les raisons évoquées dans le rapport d’Alexandra Louis pour refuser d’inscrire dans la loi l’amnésie traumatique sont très bien analysées par la présidente de l’association Moi Aussi Amnésie Mie Kohiyama, je reprends avec son autorisation une grande partie de son analyse. 


Les raisons évoquées dans le rapport montrent la non-reconnaissance du caractère médical et indépendant de la volonté des victimes de l’amnésie traumatique puisque les arguments avancés se basent essentiellement sur le caractère « subjectif » de ce mécanisme alors qu’il est objectivable cliniquement par une expertise médicale, voici les arguments présentés  :


Un magistrat de la Cour de cassation va même jusqu'à justifier les décisions successives défavorables aux victimes d'amnésie traumatique en parlant de "déclarations subjectives" et de phénomènes qui "n'existent que dans leur esprit ». Un deuxième argument porté par le Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes est que reconnaître l'amnésie traumatique créerait une inégalité entre les victimes d'amnésie traumatique et les autres qui n'auraient pas pu parler pour d'autres raisons subjectives. Selon les rapporteurs du rapport du HCEf/h Ernestine Ronai et Edouard Durand la reconnaissance de l’amnésie traumatique dans la loi  « violerait de façon évidente le principe d’égalité créant un déséquilibre entre les victimes qui ont connu une amnésie traumatique et celles qui ne l’ont pas vécu » « La prescription doit être la même pour tous » insistent-ils. 


Pour rappel, ce mécanisme psychotraumatique fréquent (qui a été l’objet d’un article référencé que j’ai écrit et qui a été publié chez Dunod) est une conséquence médicale liée à des mécanismes de sauvegarde neuro-biologiques que le cerveau met en place en situation de stress extrême. Ce mécanisme est donc directement lié à des atteintes cérébrales lors des violences et totalement indépendant de la volonté des victimes. Cette amnésie traumatique empêche les victimes de se souvenir des violences subies, elles sont donc dans l’incapacité de porter plainte. Cette amnésie traumatique représente donc bien un obstacle insurmontable objectivable cliniquement qui empêche les victimes de porter plainte dans les délais. Il est reconnu comme faisant partie des états de stress post-traumatiques dans le cadre du DSM 5 et de la CIM (les manuels de diagnostiques psychiatriques qui sont des références internationales de l’APA association de psychiatrie américaine et de l’OMS)de Les crimes sexuels sont extrêmement traumatisants, ils sont à l’origine d’amnésies traumatiques dissociatives fréquentes  : 40% des  ont des amnésies complètes, quand ils ont subi un viol ils sont 47% à déclaré en avoir eu une amnésie, 52% quand les violences étaient incestueuses et 61% quand ils avaient moins de 10 ans, dans la grande majorité des cas cette période d’amnésie a duré plus d’un an, et pour 1/3 d’entre eux cela a duré plus de 20 ans (MTV/Ipsos, 2019), elle peut durer plus de 40 ans (IVSEA, 2015). 


L’argumentation du HCEf/f est totalement retournable, le fait de ne pas prendre en compte l’amnésie traumatique pour interrompre la prescription le temps de l’amnésie traumatique représente une rupture du principe d’égalité devant la loi et une discrimination : alors que le principe d’égalité garantit que toutes les personnes sont égales devant loi et ont droit sans discrimination à une égale protection de la loi, on voit bien au contraire qu’il serait discriminatoire pour les victimes présentant une amnésie traumatique indépendante de leur volonté et qui les prive de leur capacité de saisir la justice dans les délais avant que les faits soient prescrits, de ne pas leur permettre d’avoir à partir du moment où elles recouvrent leurs souvenirs des violences de bénéficier des mêmes droits en terme de délais de prescription que les victimes qui ont toujours eu connaissance de ces faits.


Benjamin Moron-Puech, un chercheur en droit d'Assas avec lequel nous avons travaillé et qui a été auditionné lance un avertissement clair : "La France s'expose au regard de ses positions sur l’amnésie traumatique à une prochaine condamnation par la CEDH (Cour européenne des droits de l’homme). Grâce à ce chercheur le rapport préconise toutefois de supprimer la référence du code pénal à la force majeure pour définir ce qui entre dans le cadre d’un obstacle insurmontable. Sans rentrer dans les détails la force majeure est une notion de droit civil qui suppose un événement imprévisible, irrésistible et extérieur aux personnes concernées. En supprimant cette notion, les magistrats disposeront d'une plus grande latitude pour apprécier l'obstacle insurmontable, c'est à dire l'élément suspendant la prescription qui pourra être l'amnésie traumatique.


« Il faut, selon nous, aller plus loin que cette recommandation en introduisant l'amnésie traumatique dans la loi car rester dans le flou ne bénéficiera pas aux victimes. »



Et pour terminer, une réflexion sur la place des conséquences psychotraumatiques des violences sexuelles dans le rapport


L’OMS a fait de la prise en charge des conséquences psychotraumatique des violences sexuelles faites aux enfants une priorité de santé publique (OMS, Hillis, 2014), avoir subi des violences sexuelles dans l’enfance ayant de graves répercussions sur la santé mentales et physique des victimes tout au long de la vie. Ne pas pas protéger les enfants et ne pas leur apporter des soins médicaux et psychologiques spécialisés précoces représente une très grave perte de chance pour eux à court moyen et long terme.


Offrir des soins accessibles aux victimes par des professionnel.les formés, informer le grand public sur les conséquences psychotraumatiques des violences sexuelles, former les professionnels du soin au dépistage et à la prise en charge des psychotraumatismes, former également tous les professionnels qui prennent en charge les victimes pour les protéger, lors de leurs parcours judiciaire et leur reconstruction serait une véritable révolution pour secourir les victimes, les accompagner et préserver tous leurs droits à la santé, à la justice, aux réparations, et leur éviterait une très grande partie des conséquences des violences sur leur santé et leur vie, de subir de nouvelles violences et des maltraitances sans fin, une aggravation sans fin des inégalités, de leur précarité et de leurs handicaps, et permettrait de mieux leur rendre justice. Mais cela permettrait également de mieux dépister les violences, de mieux identifier les prédateurs, de rendre les procédures judiciaires plus performantes et de pouvoir mieux prendre en compte le récit des victimes, de disposer de nombreuses preuves médico-légales et de pouvoir qualifier les violences, incriminer les prédateurs et les condamner, et éviter ainsi qu’ils réitèrent des violences et fassent de nombreuses autres victimes.


En d’autres termes, prendre réellement en compte les psychotraumatismes, permettrait de lutter contre l’impunité. Cela permet de comprendre à quel point la psychotraumatologie a été maintenue dans l’ombre pendant tant d’années. Que tout a été fait pour une pas développer cette spécialité, ne pas diffuser les connaissances et les recherches la concernant, ne pas l’enseigner dans les facultés de médecine et ne pas former tous les professionnels des secteurs médico-sociaux, éducatifs, judiciaires, de la protection de l’enfance, de la police et la gendarmerie. 


C’est pour cela qu’en 2020, alors que depuis plus de 20 ans nous avons accumulé toutes les recherches et toutes les connaissances nécessaires les médecins ne sont toujours pas formés en initial (en sachant qu’ils sont désignés dans toutes les enquêtes de victimation comme le premier recourspar les victimes de violences sexuelles) et très peu en ciontinu. Et que, ce qui est totalement inconcevable, les professionnels du soin les premiers concernés, à savoir les psychiatre, ne sont toujours pas formés systématiquement à la psychotraumatologie lors de leurs études de spécialisation (ils sont même rares encore à l’être) alors que suivant les études entre 60 et 70% des patients suiviis en psychiatrie le seraient à la suite de graves traumatismes subis le plus souvent dans l’enfance et tr!s majoritairement dus à des violences, particulièrement sexuelles. 


Il est donc symptomatique par exemple de voir à quel point tout a été fait en France pour maintenir intentionnellement un niveau de connaissances catastrophiques sur les psychotraumatismes et sur leur traitement, de ne toujours pas former en initial tous les professionnels de santé, de ne pas avoir mis en place des centres de soins spécifiques pour les victimes de violences sexuelles ouverts 24h/24, accessibles et sans frais pour les victimes comme le recommande la convention d’Istanbul et de n’avoir créé que 15 centres du psychotrauma au lieu des 100 dont nous avions fait le cahier des charges, de ne pas exiger que les experts psychiatres et psychologues soient formés aux psychotraumatismes, de ne pas former  tous les professionnels de la chaîne judiciaire aux mécanismes psychotraumatiques. 


Tout cela est inacceptable et représente une très grave perte de chance pour les victime non seulement en terme de santé mais également en terme de d’accès à la justice et à des réparations. Cette absence de connaissance et ce déni des conséquences psychotraumatismes est une véritable aubaine pour ne pas dépister les victimes et pas prendre en compte les symptômes qu’elles présentent comme des preuves médico-légales performantes pour traiter leur plainte et faire condamner leurs agresseurs. Au lieu de cela, les symptômes psychotraumatiques universels et pathognomoniques des victimes (sidération, dissociation, mémoire traumatiques, conduites dissociantes de survie sont injustement et cruellement retournés contre elles pour prouver l’absence de contrainte et démontrer leur consentement, mais également décrédibiliser leurs récits, pour les psychiatriser et pour prouver qu’elles ne disent pas la vérité. (Il est à noter que dans le rapport d’évaluation alors que je suis une experte reconnue sur les conséquences psychotraumatiques des victimes de violences sexuelles pour mes travaux et mon expérience clinique tant au niveau national qu’international, que je forme depuis longtemps les professionnels prenant en charge les victimes dont les magistrats à l’ENM - j’ai même reçu la légion d’honneur par le ministère de la justice en 2018 - et que je fais partie du comité scientifique de la chaire internationale Mukwege et que je travaille avec le Dr Denis Mukwege qui a reçu le prix Nobel de la Paix pour son combat en faveur les victimes de violences sexuelles, que  l’ensemble de l’expertise, des enquêtes, des travaux et des plaidoyers que j’ai partagés lors de mon audition ne soient jamais cités ou repris, et que la seule occurence où j’apparais concerne le dépistage systématique, où on m’utilise pour dire qu’il est nécessaire uniquement avant 10 ans alors que je milite depuis 20 ans pour qu’il concerne toutes les victimes quelque soit leur âge !).


Il est grand temps de réformer de fond en comble la santé et la justice, d’opérer une révolution sociale et de ne plus tolérer les inégalités, le sexismes et toutes les autres discriminations, de sortir du système patriarcale et de mettre fin à tous ses privilèges, pour enfin lutter efficacement contre les violences sexistes et sexuelles.


Il n’est plus possible que les victimes de ces violences soient, au choix, implacablement :


  • Abandonnées à leur sort sans secours ni protection, ni soins, ni réconfort à devoir survivre seules sommées de se taire de ne pas se plaindre, de souffrir en silence sans gêner leur entourage au risque d’être critiquées, rejetées, psychiatrisées enfermées, exclues, marginalisées
  • Jamais entendues ni crues
  • Manipulées par le discours de propagande de la culture du viol pour se sentir coupables et illégitimes à se percevoir comme victimes, à dénoncer leurs agresseurs, à demander justice 
  • Privées de justice et de réparation, 
  • Condamnées à subir des injustices, des violences et des maltraitances sans fin, et à avoir peur pour toutes les autres victimes…


Ni que ce soient à elles qu’incombent de tout faire : 


  • De se défendre et se protéger seules 
  • mais également de défendre les autres victimes, parler de façon à être étendues, 
  • De se battre pour trouver de l’aide et des soins, 
  • De porter plainte dans les délais, d’être crédible au regard de tous les stéréotypes sexistes, d’être la bonne victime qui se soumet sans rien dire à toutes les exigences maltraitantes des procédures le plus souvent pour rien 
  • Et enfin d’être celles qui vont combattre sans relâche pour changer la société et les lois…


Et il n’est pas possible que toutes les personnes (professionnel.les, milita,t.es, proches) qui luttent contre la pédocriminalié et son impunité aux côtés des victimes, qui revendiquent et demandent justice, qui essaient de leur porter secours de les protéger, de les accompagner et de les soigner soient continuellement mises en cause, invisibilisées, attaquées, accusées, condamnées voire tuées (comme la jeune femme psychologue assassinée par l’agresseur d’une de ces patientes mineures alors qu’elle s’apprétait à signaler aux autorités les violences sexuelles incestueuses que sa patiente subissait…).


Il est temps de sortir du déni, de l’inaction et de remettre le monde à l’endroit. Et ce rapport n’en prend pas réellement le chemin !


Dre Muriel Salmona, psychiatre, présidente de l’association Mémoire Traumatique et Victimologie, 6 décembre 2020




Pour en savoir plus


Sur la loi Schiappa, le seuil d’âge du non-consentement, l’imprescriptibilité, l’amnésie traumatique


Afin de mieux lutter contre l’impunité de la pédocriminalité sexuelle et de mieux protéger les enfants article écrit par Muriel Salmona 2018 téléchargeable sur le site memoiretraumatique.org sur ce lien :

https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/202012_Lutter_contre_impunite_pedocriminalite_sexuelle_web.pdf



Protéger les enfants des violences sexuelles est un impératif : avant 15 ans un enfant n’est jamais consentant à des actes sexuels avec un adulte ; article écrit par Muriel Salmona 2018 téléchargeable sur le site memoiretraumatique.org sur ce lien :

https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/2018_Proteger_les_enfants_des_violences_sexuelles_est_un_imperatif_age_legal_du_consentement.pdf


Le fiasco d’une loi censée renforcer la protection des mineurs contre les violences sexuelles, article écrit par Muriel Salmona 2018 téléchargeable sur le site memoiretraumatique.org sur ce lien :

https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/20180729-Le-fiasco-d-une-loi-censee-renforcer-la-protection-des-mineurs-contre-les-violences-sexuelles.pdf


Un an après la loi dite Schiappa, l’article 2 de cette loi est bel et bien un échec… article écrit par Muriel Salmona 2019 téléchargeable sur le site memoiretraumatique.org sur ce lien 

https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/20190801-loi-schiappa-bilan-un-an-apres.pdf


Affaire Matzneff Pour mieux lutter contre la pédocriminalité et son impunité : il est impératif d’instaurer un seuil d’âge du non- consentement et de créer un crime et un délit spécifiques, article écrit par Muriel Salmona 2019 téléchargeable sur le site memoiretraumatique.org sur ce lien https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/202001_article_affaire_Matzeff.pdf 


#JusticePourJulie : Une décision judiciaire cruelle, inique et scandaleuse Notre lettre ouverte au Président de la République novembre 2020 téléchargeable sur le site memoiretraumatique.org  etsur ce lien : https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/2020-justice-pour-Julie-lettre-ouverte.pdf 




Sur le psychotraumatisme, les arguments médico-légaux concernant les traumas et l’amnésie traumatique


Le psychotraumatisme du viol : des conséquences majeures à long terme sur la vie et la santé des enfants victimes

Conférence introductive de Muriel Salmona pour la 2ème journée du 1er Congrès de la chaire internationale Mukwege, Le 14 novembre 2019 téléchargeable sur le site memoiretraumatique.org sur ce lien : https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/2020-psychotraumatisme-du-viol-chaire-Mukwege.pdf


L’analyse de la mémoire traumatique et des autres symptômes psychotraumatiques : une technique thérapeutique et médico-légale au secours des droits des victimes de viol pour obtenir soins, justice et réparations

Article de Muriel Salmona (2019) écrit dans le cadre du travail de la chaire internationale Mukwege sur la lutte contre les violences sexuelles faites aux femmes et aux filles sur le site memoiretraumatique.org sur ce lien :

https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/2020_analyse_memoire_traumatique_au_secours_des_droits_viol_soins_justice_reparations.pdf


L’amnésie traumatique : un mécanisme dissociatif pour survivre ; Article de Muriel Salmona (2018) téléchargeable sur le site memoiretraumatique.org sur ce lien :

https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Articles-Dr-MSalmona/2018-l-amnesie-traumatique.pdf



Manifestes de l’association Mémoire Traumatique et Victimologie


  • Manifeste contre l’impunité des crimes sexuels : https://manifestecontrelimpunite.blogspot.com avec ses 8 mesures pour lutter contre l’impunité avec 29 associations qui l’ont co-signé et sa pétition https://www.mesopinions.com/petition/justice/stop-impunite-crimes-sexuels/35266 soutenue par plus de 103 600 signataires.


  • Manifeste pour l’imprescriptibilité des crimes sexuels : https://manifesteimprescriptibilite.blogspot.com avec 28 associations qui l’ont co-signé et sa pétition : https://www.mesopinions.com/petition/justice/imprescriptibilite-crimes-sexuels/25896 soutenue par plus de 43 300 signataires.


  • Manifeste contre les violences envers les enfants  : https://manifestestopvfe.blogspot.com  avec ses 10 mesures co-signé par 26 asso et sa pétition : https://www.mesopinions.com/petition/politique/manifeste-stop-aux-violences-aux-enfants/28367 soutenue par près de 65 900 signataires



Campagne et Manifeste #StopPrescription :


  • Campagne vidéos et notre Manifeste #StopPrescription : https://www.memoiretraumatique.org/campagnes-et-colloques/2020-stop-prescription-2020.html initiée en juin 2020 par des responsables d’association, militant.e.s et personnalités engagées, et accompagnés de vidéos de témoignages de victimes d'amnésie traumatique suite à des violences sexuelles dans l’enfance.



Enquêtes et rapports :



  • Enquête AMTV/Ipsos : « Violences sexuelles dans l’enfance » Association Mémoire Traumatique et Victimologie/Ipsos, 2019, Rapports téléchargeables sur les sites http:// www.memoiretraumatique.org ;
  • Enquête AMTV/Ipsos : Les Français.es et le projet de loi sur les violences sexuelles concernant les muneur.e.s Association Mémoire Traumatique et Victimologie/Ipsos, 2018, Rapports téléchargeables sur les sites http:// www.memoiretraumatique.org ;
  • Enquête AMTV/Ipsos : Les représentations des français.es sur le viol 1 et 2  Association Mémoire Traumatique et Victimologie/Ipsos, 2016 et 2019, Rapports téléchargeables sur les sites http:// www.memoiretraumatique.org ;


  • Enquête CSF, « Contexte de la sexualité en France de 2006 », Bajos N., Bozon M. et l’é- quipe CSF., Les violences sexuelles en France : quand la parole se libère, Population & Sociétés, 445, mai 2008.
  • Enquête CVS Insee-ONDRP, Cadre de vie et sécurité de l’Observatoire national de la dé- linquance et des réponses pénales ONDRP– Rapport annuel sur la criminalité en France 2012 – 2017.
  • Enquête IVSEA, « Impact des violences sexuelles de l’enfance à l’âge adulte », conduite par Association Mémoire Traumatique et Victimologie avec le soutien de l’UNICEF France: Salmona Laure auteure, Salmona Muriel coordinatrice, 2015, Rapport et synthèse téléchargeables sur les sites http://www.memoiretraumatique.org.
  • Enquête VIRAGE INED « Premiers résultats sur les violences sexuelles » : Alice Debauche, Amandine Lebugle, Elizabeth Brown, et al., Documents de travail n° 229, 2017, 67 pages.
  • Infostats Justice, « Violences sexuelles et atteintes aux mœurs : les décisions du parquet et de l’instruction », Bulletin d’information statistique du ministère de la Justice, n° 160, 2018.
  • Infostats Justice, « Les condamnations pour violences sexuelles », Bulletin d’information statistique du ministère de la Justice, n°164, 2018.
  • REDRESS, « Réparation pour viol, Utiliser la jurisprudence internationale relative au viol comme une forme de torture ou d'autres mauvais traitements », 2013., disponible à l’adresse suivante : www.redress.org
  • World Health Organization, « Global Status Report on Violence Prevention », Genève, WHO, 2014, 2016. OMS. INSPIRE : Sept stratégies pour mettre fin à la violence à l’encontre des enfants : résumé d’orientation. Genève, Suisse : OMS 2016.



Ouvrages et articles :



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